"Nos clients demandent l'addition": pourquoi la municipalité a décidé de sévir contre les artistes de rue trop braillards à Nice
La municipalité a décidé de sévir. Alors que chanteurs, danseurs et autres acrobates investissent l'espace public pour les beaux jours, des "débordements liés aux artistes de rue", ont été observés dans la capitale de la Côte d'Azur, a annoncé Anthony Borré, le premier adjoint au maire de Nice.
"Nous constatons, à travers les doléances et signalements de riverains, des désagréments considérables de chanteurs individuels avec de grosses sonorisations ou de troupes qui se produisent sur l’espace public", précise-t-il. Les endroits où ces problèmes reviennent avec insistance: la place Masséna et le quai des États-Unis.
"Sur les terrasses de la place Masséna, notamment, les beaux établissements qui s’y sont installés me disent que leur clientèle n’en peut plus d’être invectivée, sollicitée, déclare Anthony Borré. Et ces individus sont désagréables quand on va leur parler".
Qu’en pensent les restaurateurs des secteurs dans le collimateur de la Ville?
Quai des États-Unis, le responsable d’une enseigne met les points sur les "i". Mais sans décliner son identité: "Il ne faudrait pas mélanger artistes de rue avec ceux qui viennent parfois jouer chez nous, car nous aussi, nous proposons des animations à notre clientèle, le soir, et ce serait dommage qu’il y ait des amalgames."
Tous les artistes de rue se produisent sur le versant sud du front de mer. "Donc, de l’autre côté des bars et restaurants du quai. Et ils ne posent pas vraiment problème. D’autant qu’il y a des pros qui font des choses de qualité."
"La cour des miracles"
Au Savoia Caffe, Charles, le responsable, fait preuve de bienveillance: "Pour moi, pas de souci, ces artistes sont là pour gagner un peu d’argent. Moi je suis pour la musique. En plus, ils sont en face et ne dérangent personne, ne font pas la quête parmi nos clients, alors…"
Cette tolérance est moins perceptible du côté de la place Masséna. Là, où se produisent régulièrement chanteurs, breakdancers, musiciens… Leur point de ralliement: un candélabre au débouché de la zone piétonne et en avant les décibels. Et ça ne passe pas toujours. En particulier pour cet assistant directeur d’une des enseignes de l’esplanade, qui souhaite garder l’anonymat: "Par rapport au Covent Garden de Londres, ici c’est un peu la cour des miracles. Pas d’homogénéité, même si certains artistes travaillent leur programmation. Il y a de bons chanteurs, mais ils chantent trop fort. Certains de nos clients demandent l’addition, parce que ça hurle dans le micro, ça harangue la foule. Des artistes de rue ont des autorisations de 45 minutes et restent jusqu’à six heures!"
Un cahier des charges sélectif
Être plus sévère? "Mieux vaudrait définir au préalable un cahier des charges strict avec des auditions pour être qualitatif. C’est ce qu’il se passe à Londres avec une société privée qui teste scrupuleusement ceux qui veulent se produire dans la rue."
Chez So Green, à l’angle de la rue Gioffredo, Coralie Dorai, la responsable, ne mâche pas ses mots. Les artistes de rue au quotidien devant sa terrasse? "C’est une catastrophe! C’est fort, ça gueule, ça ne chante pas en fait. J’ai des clients qui préfèrent s’en aller. Alors oui, interdire les sonorisations, je valide à fond. En plus, je ne suis pas sûre que tous les gens qui se produisent aient une autorisation. Ils restent des heures et des heures et ils gênent."
Source: Nice matin