Le tourisme russe a changé de visage depuis l’invasion de l’Ukraine

May 21, 2023
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Des bus de tourisme devant l’Opéra Garnier, à Paris, le 22 février 2018. STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

« Vous vous souvenez de ces dizaines de cars de touristes près de l’Opéra Garnier ? Aujourd’hui, vous en voyez beaucoup moins, n’est-ce pas ? » Guide présent en France depuis 1994, Sergueï Pankov a, sans surprise, perdu une grande partie de sa clientèle depuis l’invasion de l’Ukraine, en février 2022. « Avant, je travaillais avec des gens qui venaient de partout, y compris de Vladivostok [en Sibérie]. Des personnes issues des classes moyennes, des retraités par exemple », explique-t-il.

Adepte des voyages organisés, cette clientèle a désormais disparu, pour laisser place aux seuls touristes individuels huppés, voire extrêmement riches. « Il leur arrive de descendre au Shangri-La [hôtel parisien de luxe] , de louer un bateau privé à 800 euros pour une balade d’une heure trente avec champagne sur la Seine, sachant que c’est 5 000 euros avec le dîner », détaille M. Pankov. L’Opéra Garnier, le Louvre, Versailles : ils prisent les grands classiques. « On discute de géopolitique, mais je fais attention, car il y a des avis partagés, et notre but c’est d’évoquer la culture, l’histoire, pas de faire de la politique. » Parfois, ajoute-t-il, certains se renseignent au préalable sur le risque de possibles agressions contre des russophones.

La guerre n’a pas complètement tari le tourisme russe dans les pays occidentaux, même si celui-ci a changé de visage. Avec les sanctions, et la fermeture du ciel aérien européen aux compagnies russes et aux jets privés des oligarques à la fin février 2022, ces voyageurs doivent désormais faire étape à Istanbul, Belgrade, Erevan, Podgorica ou encore Dubaï, s’ils veulent rejoindre l’Union européenne (UE).

Examen plus pointilleux des demandes de visa

« Venir de Russie aujourd’hui coûte cher, extrêmement cher, et prend beaucoup plus de temps », confirme Sveta Azur, originaire d’Asie centrale et guide à Nice. Résultat, sa clientèle, comme celle d’autres professionnels, est essentiellement constituée de Russes habitant l’UE, Londres, Israël ou les Etats-Unis, avec en général deux passeports ou une carte de résidence. « Environ 90 % habitent en Europe et 10 % viennent de Russie », détaille-t-elle, notant également la présence de touristes ukrainiens. Ce que confirme Vladimir Yatsko, guide biélorusse depuis quarante ans à Paris : « La semaine [du 8 mai], un couple est venu de Kiev pour fuir la guerre et se reposer », raconte-t-il.

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Le conflit a redistribué les cartes selon les budgets, mais aussi les affinités géopolitiques. Au sein de l’UE, depuis septembre 2022, l’examen des demandes de visa pour l’espace Schengen se fait plus pointilleux. Selon le ministère français du tourisme, qui se réfère aux estimations d’Oxford Economics, le nombre de visiteurs russes dans l’Hexagone, qui avoisinait 310 000 personnes en 2019, avant la pandémie de Covid-19, ne s’établissait plus qu’à 99 300 en 2022.

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Source: Le Monde