En Russie, la guerre contre "les valeurs décadentes de l'Occident" passe par l'effacement de l'anglais dans les rues, le métro et l'enseignement
La confrontation entre la Russie et les pays occidentaux, depuis le début de la guerre en Ukraine, se joue aussi sur le plan culturel et linguistique : le pouvoir russe a engagé un processus d'effacement progressif de l'anglais dans l'espace public.
En Russie, le pouvoir martèle jour après jour que le pays est en guerre, non pas contre l'Ukraine, mais contre l'Occident, et les Etats-Unis tout particulièrement. Un combat militaire, mais aussi idéologique et culturel, qui se concrétise par la défense de ce que les dirigeants russes appellent "les valeurs traditionnelles de la Russie", face aux "valeurs décadentes occidentales". Illustration de cette volonté : la tentative de suppression discrète et progressive de la langue anglaise dans l'espace public, à l'école ou encore dans le métro.
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À Moscou, on ne compte plus les magasins, les enseignes, les publicités qui mélangent allègrement russe et anglais, parfois sans traduction. Pour la jeunesse russe éduquée, l'anglais est une deuxième langue souvent bien maîtrisée. Mais ces derniers temps, des signaux venant d'en haut font planer le spectre d'un bannissement de l'anglais de l'espace public. Un député avait déjà proposé que son apprentissage ne soit plus obligatoire à l'école, et la semaine dernière, lors d'une réunion avec des dirigeants d'anciennes républiques soviétiques, le président de la Douma Viatcheslav Volodine a enfoncé le clou : "Apprenons nos langues nationales ! L'anglais est une langue morte. C'est du passé."
L'anglais disparaît du métro moscovite
S'il n'y a pas encore de consignes officielles, certains prennent des initiatives : les nouvelles stations de métro inaugurées ces derniers mois à Moscou n'ont plus d'indication en anglais. Et dans les anciennes, certains panneaux entièrement en cyrillique ont fait leur apparition. À l'école, la culture anglo-saxonne peut être un sujet de discorde entre les élèves, confiait récemment Alexandra, une enseignante moscovite : "Dans ma classe, il n'y a pas de conflit à ce sujet, probablement parce que d'une certaine manière, ils l'évitent. Mais parfois, certains enfants refusent de faire leurs devoirs d'anglais. Ils disent : 'C'est la langue de l'ennemi, on ne va pas l'apprendre maintenant' !"
Cette tendance est malgré tout combattue par une partie de la société russe. Le mois dernier, les étudiants du prestigieux Institut de physique et de technologie de Moscou ont obtenu que la direction renonce à remplacer l'apprentissage de l'anglais par celui du chinois, comme elle l'avait annoncé.
Source: franceinfo