Transition écologique : Bruno Le Maire exclut tout recours à l'impôt et à la dette

May 23, 2023
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Par Anne Feitz

Publié le 23 mai 2023 à 10:41 Mis à jour le 23 mai 2023 à 11:49

Comment financer la lourde facture de la transition écologique ? Au lendemain de la publication du rapport de Jean Pisani-Ferry, qui portait notamment sur ce sujet, le gouvernement écarte explicitement aussi bien le recours à la fiscalité qu'à la dette publique - les deux options mises sur la table par l'économiste.

« L'impôt n'est pas une solution, notre politique est de baisser la pression fiscale », a assuré sur RTL ce mardi matin le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, qui a aussi exclu « d'aggraver l'état de nos finances publiques. Les deux options qui ne sont pas de bonnes options à mon sens, c'est l'augmentation des impôts ou l'augmentation de notre dette qui est déjà trop élevée », a-t-il insisté.

Une facture colossale

Sur France Inter, le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, a de même écarté l'idée d'un impôt exceptionnel sur les hauts patrimoines, préconisé par Jean Pisani-Ferry. « Au cours de la présentation de son plan hier, […] la Première ministre disait elle-même qu'il allait falloir faire contribuer davantage ceux qui peuvent contribuer le plus. Est-ce que ça passe par la fiscalité ? Je ne crois pas. On peut y arriver sans », a-t-il affirmé.

Commandé par Elisabeth Borne et publié lundi, le rapport de Jean Pisani-Ferry et de l'inspectrice des finances Selma Mahfouz a évalué que la transition écologique nécessiterait un investissement supplémentaire de 66 milliards d'euros par an, dont 34 milliards assumés par les finances publiques. Sans parler des recettes perdues : ils rappellent que les taxes sur les énergies fossiles ont représenté 35 milliards en 2021.

Pour financer cette facture colossale, les coauteurs préconisent à la fois un recours à l'impôt et à la dette. Ils proposent une taxe exceptionnelle et temporaire de 5 % sur le patrimoine financier des 10 % de Français les plus riches, prélevée en une fois, qui rapporterait, selon eux, 150 milliards d'euros sur trente ans, soit 5 milliards par an. « Il s'agit de convaincre les Français que la charge est équitablement répartie », a expliqué Jean Pisani-Ferry.

Verdissement de la fiscalité

Les coauteurs estiment aussi que l'endettement public serait dans ce cas justifié. « Il y a beaucoup de mauvaises raisons de s'endetter, et le climat n'en est pas une ! », a insisté l'économiste. Selon leurs calculs, 250 à 300 milliards d'euros cumulés pourraient être ainsi dégagés à l'horizon 2030, alourdissant la dette publique de 10 points de PIB supplémentaires.

Deux pistes que Bruno Le Maire a donc exclues ce mardi. « Les 10 % des Français les plus riches paient déjà 75 % de l'impôt sur le revenu », a-t-il argumenté.

Pour financer la transition écologique, le locataire de Bercy a rappelé les pistes déjà évoquées pour financer la loi sur l'industrie verte : le verdissement de la fiscalité (suppression des niches fiscales sur les énergies fossiles, alourdissement des taxes et autres malus sur les véhicules thermiques) ; la mobilisation de l'épargne des Français avec notamment la création d'un nouveau plan d'épargne avenir climat ; le financement par les entreprises et enfin la mobilisation des banques, comme la Banque européenne d'investissement (BEI) qui « doit devenir la banque du climat ».

« Voilà quatre solutions alternatives que je mets ce matin sur la table, tout ça doit nous permettre d'avoir les moyens de financer la transition écologique », a conclu Bruno Le Maire.

Compte tenu des sommes en jeu, il n'est pas sûr que l'équation résiste à l'épreuve de la calculette.

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Source: Les Échos