Casino : l’ascension et la chute du système Naouri

May 26, 2023
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Un magasin Casino, à Nantes, le 10 mai 2023. STEPHANE MAHE / REUTERS

Un cataclysme pour le groupe Casino (Monoprix, Franprix, Cdiscount…) et ses 208 000 collaborateurs. Le groupe a annoncé, vendredi 26 mai, que le président du tribunal de commerce de Paris avait décidé la veille l’ouverture d’une conciliation à son bénéfice et celui de certaines de ses filiales. « Cette procédure a pour objectif de permettre au Groupe Casino d’engager des discussions avec ses créanciers dans un cadre juridiquement sécurisé », a précisé le distributeur.

Maître Aurélia Perdereau et Maître Marc Sénéchal sont nommés conciliateurs. Réduire l’endettement, qui atteint 6,4 milliards d’euros, est un préalable indispensable pour renflouer le groupe. En parallèle, des discussions sont en cours avec des repreneurs. Rallye, la maison mère de Casino, fait également l’objet d’une conciliation depuis le 22 mai.

La blessure infligée le 17 décembre 2015, jour de la publication d’une analyse financière au vitriol contre Casino, s’est donc révélée mortelle. Alors que l’action avait coté plus de 97 euros en juillet 2014, le spéculateur américain Muddy Waters, estimait sa « vraie » valeur à 6,91 euros. Une folie, pensait-on à Paris. Mais certaines coïncidences donnent le vertige. L’action Casino a été suspendue, lundi 22 mai 2023, à 6,76 euros. La capitalisation boursière du fleuron tricolore est ainsi passée de 5,66 milliards d’euros, juste avant le brûlot de Muddy Waters, à 733 millions d’euros…

Pourtant, Jean-Charles Naouri, le père de la modernisation des marchés financiers en France, semblait avoir réussi le plus dur : sa conversion en épicier hors pair. C’est en effet par hasard que le défroqué de « Rivoli » − comme on appelait alors le ministère des finances − a investi le secteur de la distribution. Soutenu par David de Rothschild, l’énarque et inspecteur des finances crée Euris en 1987 afin de réaliser des coups boursiers. En 1991, il reprend Rallye, l’enseigne bretonne en grandes difficultés. Il apporte dans la foulée le distributeur à Casino, dans le giron de la famille Guichard, en échange d’une part au capital.

De fil en aiguille, il devient bâtisseur d’empire, mettant la main sur Casino, Leader Price, Franprix, Go Sport… Au jeu des alliances et des trahisons, il est le plus fort. En 2012, au faîte de sa puissance, il remporte deux bras de fer contre ses ex-partenaires : l’un contre la famille Houzé, contrainte de lui céder l’intégralité de Monoprix ; l’autre contre l’homme d’affaires brésilien Abilio Diniz, obligé de lui lâcher le contrôle de Grupo Pao de Açucar.

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Source: Le Monde