Naufrage meurtrier dans la Manche en 2021 : cinq militaires mis en examen

May 26, 2023
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C’est la suite judiciaire logique des investigations menées sur les circonstances du naufrage survenu dans la nuit du 23 au 24 novembre 2021, au cours duquel au moins vingt-sept personnes sont mortes noyées au large de Calais, en tentant de rejoindre l’Angleterre. Cinq militaires du centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (Cross) de Gris-Nez (Pas-de-Calais) ont été mis en examen pour non-assistance à personne en danger, jeudi 25 mai.

Au total, neuf personnes avaient été placées en garde à vue ces derniers jours, dans le cadre de l’instruction pénale menée par trois magistrats de la juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée du tribunal judiciaire de Paris.

Ces mises en examen font écho aux conclusions des enquêteurs qui, d’après des éléments dont Le Monde avait fait état en novembre 2022, estimaient que l’attitude des militaires chargés d’organiser les secours des embarcations en difficulté dans la traversée de la Manche vers l’Angleterre était susceptible de recevoir une qualification pénale.

Aucun moyen de sauvetage envoyé

En l’occurrence, les enregistrements des communications entre le Cross et l’embarcation naufragée ont permis de révéler que les occupants du bateau avaient appelé à de très nombreuses reprises les secours français pour les prévenir que leur canot prenait l’eau sans qu’à aucun moment un moyen de sauvetage leur soit envoyé. « Nous sommes dans l’eau. Fini. Fini. Aidez-nous s’il vous plaît. Aidez-nous. (…) Nous sommes en train de mourir. Nous sommes dans la mer, dedans, dedans (…) il fait froid », avaient notamment imploré les passagers au téléphone, tandis que les opérateurs du Cross semblent avoir préféré attendre que l’embarcation atteigne les eaux anglaises, pour passer le relais à leurs homologues britanniques.

La retranscription des conversations laissait, entre autres, apparaître des commentaires d’une opératrice qui, alors qu’un passager la suppliait d’intervenir, disait en aparté à un de ses collègues : « Je vais lui sortir la phrase magique, pas de position [GPS], pas de bateau de secours. » Ou encore : « Ah bah t’entends pas, tu seras pas sauvé. J’ai les pieds dans l’eau, bah… je t’ai pas demandé de partir. » « Souvent [les migrants] appellent et crient au danger alors qu’ils n’ont rien », avait tenté de justifier un autre militaire auditionné peu après le naufrage.

Les mis en examen étaient tous de service le soir du drame. Sollicitée, jeudi 25 mai, par Le Monde, la préfecture maritime de la Manche et de la mer du Nord n’a pas souhaité faire de commentaire, mais la porte-parole, Véronique Magnin, assure que « la confiance du préfet maritime reste entière pour l’ensemble des sauveteurs qui œuvrent au quotidien ».

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Source: Le Monde