Formule 1 : " La domination est trop grande ", Red Bull commence (déjà) à ennuyer les fans
Le Grand Prix le plus mythique du calendrier va-t-il encore virer à l’ennui avec une nouvelle démonstration de Red Bull ? C’est ce que redoutent les fans de Formule 1 avant le Grand Prix de Monaco ce week-end. Plus réputée pour ses stars que pour ses dépassements, la course dans les rues de la principauté pourrait déboucher sur un Grand Prix peu spectaculaire, encore marqué par la domination de Max Verstappen et de son coéquipier Sergio Perez.
Un peu à l’image du dernier Grand Prix de Miami, remporté par le champion en titre, ou celui de Bakou, lors duquel Perez était sorti victorieux. Des courses jugées ennuyeuses par les téléspectateurs de Canal+, le diffuseur officiel, comme en témoignent les notes de 11.7 et 11.4 obtenues par ces deux derniers rendez-vous du début de saison de Formule 1. C’est simple, Red Bull rafle tout avec déjà cinq victoires, dont quatre doublés en cinq courses.
« Un meilleur travail que les autres »
Une domination née du très bon travail de l’écurie autrichienne comme s’y accorde le PDG de la Formule 1, Stefano Domenicali dans le Financial Times, « cette année, il nous faut dire la vérité : Red Bull a fait du meilleur travail que les autres, c’est un fait », et Günther Steiner, le team manager de Hass, « Red Bull a fait un travail fantastique. Ils ont simplement fait un meilleur travail que les autres », comme il l’expliquait à Motorsport.com.
Franck Montagny, le consultant F1 de Canal+, les rejoint d’ailleurs sur ce point : « c’est juste qu’ils ont mieux travaillé que tout le monde. Ils avaient déjà tout gagné l’année dernière avec des problèmes de fiabilité en début de saison qu’ils n’ont pas cette année. Ce n’est donc pas étonnant de voir Red Bull faire un et deux ».
« Tu t’obliges à regarder autre chose »
Au point de déjà se lasser de cette ultradomination de Red Bull après seulement cinq courses ? « Ce n’est pas que ça me lasse, mais tu t’obliges à regarder autre chose, la bataille pour les places 1 et 2 n’est pas intéressante, la domination est trop grande », avance Franck Montagny. Au point d’estimer que « ce n’est pas la bonne année pour commencer à s’intéresser à la F1. Si ton premier Grand Prix c’est Miami, effectivement il y a quoi se demander ou est l’intérêt ».
Difficile de lui donner tort quand on voit la course de Max Verstappen à Miami. Parti seulement 9e sur la grille de départ, il ne lui a suffi que de 15 tours pour dépasser l’Aston Martin de Fernando Alonso, le premier des autres, quand le double champion du monde prédisait avant la course 25 tours pour voir son jeune rival dans ses rétros. De quoi faire dire à Romain Grosjean, l’ancien pilote de Formule 1 et consultant pour Canal+ quand il ne roule pas en IndyCar, qu’il y avait « un grand prix normal et un grand prix Red Bull à Miami ». Max Verstappen a gagné avec plus de 5 secondes d’avance sur son coéquipier Sergio Perez, et 26 (!) sur Fernando Alonso, 3e.
Les amoureux de la Formule 1 sont donc finalement contraints à porter leur regard sur des enjeux de secondes zones, et heureusement il y a du spectacle. « Il se passe encore plein de choses, par exemple personne n’aurait misé un euro sur la 3e place de Fernando Alonso, et les bonnes performances d’Aston Martin. Alpine rencontre aussi pas mal de problèmes. Si on n’avait pas ces deux Red Bull il y aurait tous les ingrédients pour un super championnat », estime même Franck Montagny.
Barcelone, le révélateur
Heureusement pour les fans de Formule 1, l’écart devrait finir par se resserrer entre Red Bull et les autres écuries, à commencer par Ferrari et Mercedes. Reste à savoir quand. « On va revoir des batailles, Monaco n’est pas forcément le Grand Prix où ça double le plus. Mais on peut s’attendre à ce que Barcelone [le week-end prochain] donne des informations sur les évolutions des voitures. Red Bull devrait rester 1 et 2, mais plus avec autant d’avance, le classement devrait être plus compact », prédit Franck Montagny.
La Formule 1, qui a toujours voulu mettre en avant le côté spectaculaire de la discipline à l’image de la série Netflix, Pilotes de leur destin, ne laisserait de toute façon pas une équipe dominer outrageusement plusieurs saisons et « des changements techniques pourraient aider les autres équipes », estime l’ancien pilote. Un peu à l’image du Moto GP, où les derniers du classement ont plus de jours d’essais la saison suivante.
Changer de réglementation ?
Mais pour Günther Steiner, « il est normal qu’ils restent en tête sans qu’il soit nécessaire d’intervenir sur le plan réglementaire. Il n’est pas juste d’intervenir simplement parce que quelqu’un est plus rapide ». D’autant plus que la nouvelle réglementation aérodynamique introduite la saison dernière visait justement à faire en sorte que les monoplaces puissent davantage se suivre, pour plus de spectacle.
Le resserrement entre les équipes pourrait-il plutôt venir de l’instauration du « budget cap », sortir de fair-play financier à la sauce auto ? Franck Montagny se montre sceptique : « Ça fait seulement deux ans qu’il est introduit et c’est trop tôt pour que ça porte ses fruits. Il faut attendre encore deux ou trois ans. Parce que les écuries qui avaient des budgets de 500 millions, contre 140 millions aujourd’hui, ont investi tout cet argent avant le budget cap », avance-t-il. A l’image d’Aston Martin et sa toute nouvelle usine qui n’est pas encore totalement opérationnelle. Et dont on voit pourtant déjà les fruits en piste avec leur 2e place au classement des constructeurs, eux qui avaient fini 7e la saison dernière.
Source: 20 Minutes