Test de la Dacia Spring Extrême : une électrique low cost à 22 000 euros, est-ce bien sérieux ?

May 29, 2023
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La Dacia Spring débarque dans une version plus puissante, plus soignée et savamment modifiée pour corriger ses défauts originels. Mais ces modifications s’accompagnent d’un prix encore plus élevé. La moins chère des électriques est-elle toujours une bonne affaire ?

Malgré une hausse de prix de près de 4 000 euros depuis son lancement, la Dacia Spring demeure la voiture électrique la moins chère du marché. Cette augmentation tarifaire – elle est désormais proposée à 20 800 euros -, ne semble pas refroidir les potentiels acheteurs puisque la citadine de Dacia est la voiture électrique la plus vendue en France. Fort de ce constat, la marque roumaine, propriété de Renault, a opté pour une montée en gamme incarnée par l’arrivée d’une nouvelle version, « Extreme », de sa petite puce électrique. Celle-ci s’affiche à 1 500 euros de plus, soit à un tarif de départ de 22 300 euros et promet, en plus d’une meilleure qualité de finition, de corriger les défauts de conduite de la version initiale. Que vaut vraiment cette Dacia Spring Extreme 65, mérite-t-elle son prix ?

Qu’est-ce qui change sur la « nouvelle » Dacia Spring ?

Afin de juger de la pertinence de cette nouvelle version, il convient de faire l’inventaire de ses différents changements. La version Extreme 65 se distingue déjà par son allure. Deux nouveaux coloris (bleu ardoise et vert cèdre), ornés de finitions cuivrées, symbolisent la montée en gamme.

Malgré ces jolis ajouts graphiques, l’essentiel de la nouvelle Spring est ailleurs, sous le capot. En effet, la citadine électrique de Dacia opte pour un « nouveau » moteur qui fait passer sa puissance de 45 ch à 65 ch. Cette modification technique sur laquelle nous reviendrons en détail est censé doter la Spring d’un meilleur comportement routier, notamment lorsqu’elle dépasse les 80 km/h, ce qui était l’un de ses gros points faibles jusqu’ici.

Une présentation plus soignée, mais pas de montée en gamme

Ces touches de « brun cuivré » que l’on retrouve sur les barres de toit, les coques de rétroviseur, les protections latérales ou encore sur le nouveau logo Dacia, qui s’étend sur le hayon, apportent un certain caractère à la citadine.

On les retrouve également, soigneusement disséminées à l’intérieur du véhicule. Sur le bloc de navigation, le contour des aérateurs ou encore le dessin des portes. Mais ces éléments cuivrés ne sont qu’un cache-misère tant l’ensemble sonne le plastique creux et rigide déjà aperçu sur la première version. Malgré les apparences, Dacia se contente encore du strict minimum et d’un intérieur qui commence sacrément à dater. Il faut dire que la Spring est une adaptation d’un véhicule low cost, produit en Chine, à destination du marché asiatique, dans la précédente décennie. C’est dire si la Spring part avec un certain handicap… Cette recette à base d’ingrédients peu chers a pourtant réussi à séduire plus de 100 000 clients en Europe, dont 43 000 en France, nous direz-vous. Certes, mais il convient de rappeler qu’à l’époque le prix de la citadine électrique était de 16 990 euros, hors bonus, soit près de 7 000 euros moins cher.

En matière de finition, en dehors de ces touches cuivrées, rien ne change. Le système embarqué a l’air de venir d’un lointain passé et ne doit son salut qu’à la compatibilité CarPlay et Android Auto. D’ailleurs l’intégration du port USB est toujours aussi lunaire, obligeant le fil du smartphone à pendre au milieu de l’écran. Bien entendu, nous n’attendons pas de la moins chère des voitures électriques des prestations comparables aux berlines allemandes, mais lorsqu’on prétend monter en gamme, il faut un minimum de sérieux. Mais doit-on s’obstiner à juger les finitions de la low cost électrique de Dacia, lorsque le principal apport de la version Extreme se trouve sous le capot ?

Plus puissante, mais à quel prix ?

La raison d’être de cette version Extreme, serait son nouveau moteur de 65 ch. Nouveau, vraiment ? De l’aveu même de Dacia, il s’agit du même moteur qui équipait la première version de la Spring et qui a subi quelques retouches bien senties pour offrir un surplus de puissance. Il ne s’agit pas d’un tour de passe-passe, mais bien d’une évolution, le moteur synchrone à aimant ayant été musclé pour tourner à plus de 14 000 tours/min contre 8 000 tours/min auparavant.

Comment Dacia est-il parvenu à ce résultat ? Concrètement, les ingénieurs de la marque ont renforcé les bobines autour du stator et l’ont doté d’un plus grand réducteur. L’ensemble pèse 5 kg de plus, mais permet d’augmenter le régime maximal de rotation, ce qui offre plus de vélocité à la Spring. Certes, sa vitesse maximale est toujours limitée à 125 km/h, mais désormais le 0 à 100 km/h s’abat en 13,7 secondes, une valeur honnête surtout en comparaison des 19,1 secondes dont la Spring avait besoin avant cette retouche moteur.

Mais ce que Dacia a plus de mal à avouer, c’est que ce moteur de 65 ch n’a pas que des conséquences heureuses sur les performances de la citadine. Les premières sont purement comptables. Il y a d’abord une baisse du couple (de 125 Nm à 113 Nm), mais aussi une réduction de l’autonomie (220 km en homologation WLTP, contre 230 km auparavant).

Le calcul audacieux de Dacia

Ces baisses de performances minimes sont théoriques, le principal souci de ce nouveau moteur est davantage lié à l’usage qui pourrait être fait de la Spring. Explications :

Le moteur plus puissant de la Spring augmente de fait la consommation du véhicule. Dans le cadre de l’homologation WLTP, cette moins bonne autonomie reste somme toute limitée à 10 km. Mais dans la vie réelle, en usage courant, cette consommation est essentiellement liée à la vitesse de conduite. Si à faible allure, les rendements des deux blocs moteurs sont assez similaires, la donne change à plus haut régime où le moteur de 65 ch consomme bien plus que son prédécesseur de 45. Concrètement, plus vous roulez sur des portions rapides, routes nationales, mais surtout des autoroutes, plus la nouvelle Spring aura tendance à surconsommer par rapport à la Spring originale.

Dacia en est conscient, mais pour la marque d’entrée de gamme de Renault, c’est un compromis nécessaire qui est en plus encouragé par la façon dont les utilisateurs de la Spring conduisent leur petite électrique. En effet, le constructeur se base sur les données recueillies auprès des Spring actuellement en circulation pour justifier ce choix potentiellement périlleux pour l’autonomie.

Selon Dacia, les utilisateurs de Spring parcourent 31 km/jour à une vitesse moyenne de 26 km/h. Autrement dit, la citadine de Dacia sert rarement à s’offrir de fortes sensations sur la route. Son usage est essentiellement citadin. C’est cette donnée qui permet à Dacia de tenter ce pari particulièrement audacieux : confier aux conducteurs un moteur plus puissant, dont la vélocité ne sera utilisée que dans ses phases les moins gourmandes. Le calcul semble risqué et pourrait nettement changer l’expérience en Spring selon le type d’utilisateur. En d’autres termes, si votre itinéraire quotidien est majoritairement autoroutier, il vous faudra fortement nuancer les valeurs d’autonomie de la Dacia Spring Extreme.

Comportement routier en amélioration, pneus en perdition

Saluée pour son rapport qualité/prix plutôt intéressant, la Spring première du nom avait été vivement critiquée pour sa tenue de route et son comportement assez hiératique, notamment sur autoroute. Pour améliorer cet aspect, la Spring Extreme ne mise pas uniquement sur un moteur plus puissant. D’autres évolutions, qui seront d’ailleurs apportées aux autres versions de la citadine, sont au rendez-vous. Il s’agit essentiellement de calibrages au niveau de la direction et des amortissements.

Concrètement, au cours de notre essai, nous avons constaté une légère amélioration du comportement de la Spring. La petite puce ne donne plus la sensation d’être en perdition sur l’autoroute, ni même de peiner lorsqu’il faut effectuer une reprise à 80 km/h. En ce sens, elle adopte un comportement plus digne des électriques. Néanmoins, malgré les corrections apportées à sa direction, les progrès sont assez limités sur la tenue de route. Un virage un peu serré et l’ESP se met tout de suite en branle… pour une correction pas toujours heureuse. Le changement au niveau de la suspension est sans doute réel, mais il ne fait pas de miracles et la Spring semble toujours flotter quelque peu dans les virages. La raison ? Elle incombe principalement à ses pneus de piètre qualité. Le souci est connu et documenté chez Dacia qui rechercherait activement une alternative. Seul souci selon le constructeur : « il y a peu de pneus premium en 14 pouces actuellement sur le marché ». Compte tenu du volume de ventes réalisé par Dacia sur ce modèle, il y a fort à parier qu’un manufacturier de pneumatiques se saisisse de la question.

En définitive, les progrès sont réels en matière de comportement routier, mais limités. La Spring donne l’impression d’être une voiture plus sûre à conduire, mais c’est tout sauf une garantie d’obtenir une seconde étoile au test EuroNCAP. Surtout, avec sa limite de vitesse à 125 km/h et un couple en retrait, elle fait pâle figure face à une Twingo E-Tech, autrement plus dynamique. Un changement de pneumatiques pourrait éventuellement améliorer ses performances, mais il ne transcendera pas la citadine de Dacia pour autant.

Autonomie : douce en ville, vertigineuse sur autoroute

Notre boucle d’essai dans les environs de Vienne, en Autriche, nous a permis de confirmer la grande variation du moteur en matière de consommation. En effet, sur les parties autoroutières, à vive allure sur les routes secondaires, notre consommation dépassait les 18 kWh/100 km. Dans cette configuration, l’autonomie de la Spring peut donc descendre sous les 150 km.

En revanche, une fois en ville ou à plus faible allure, la consommation chute de manière vertigineuse. Le poids contenu de la Spring, ces petites roues de 14 pouces et sa taille réduite deviennent alors ses principales armes pour faire baisser la jauge à moins de 11 kWh/100. Au final, sur notre parcours de test d’une centaine de kilomètres, très majoritairement urbain, la consommation moyenne s’est stabilisée à 12,4 kWh/100 km, ce qui tend à confirmer ce qui ressemble à une évidence : aussi Extreme soit-elle, la Spring reste un véhicule urbain.

Côté recharge, il n’y a aucun changement à signaler sur cette nouvelle finition. La citadine de Dacia peut accepter jusqu’à 7 kW sur courant alternatif. La recharge rapide, elle, est limitée à 30 kW, mais n’est disponible qu’en option. Pour recharger la Spring un peu plus vite, il faudra débourser 600 euros de plus pour le chargeur Combo et 250 euros pour un câble Type 2 compatible avec une Wallbox. Certes, la plupart des propriétaires de Spring font le plein de leurs 26,8 kWh sur une prise classique, à domicile, mais encore une fois, on ne peut que s’étonner du tarif de l’option pour ceux qui souhaiteraient passer à la vitesse supérieure.

La Dacia Spring Extreme face à la concurrence

Comme pour sa version précédente limitée à 45 ch, la nouvelle Dacia Spring bénéficie d’une position hégémonique. Elle est tout simplement sans concurrents. Néanmoins, à force de faire gonfler son tarif, la citadine électrique roumaine pourrait finir par se brûler les ailes. En effet, à 22 300 euros au minimum, elle se rapproche dangereusement de la Renault Twingo E-Tech (25 200 euros), autrement mieux équipée.

Enfin, elle devra également faire face, dès les prochains jours, à l’arrivée d’une citadine chinoise, la Leapmotor T03, plus performante et mieux finie, elle aussi, et qui ne demande que 3 000 euros de plus. Même la MG4 dans sa version d’entrée de gamme à 29 990 euros pourrait être envisagée pour un acheteur avec une marge supplémentaire. Autrement dit, la Spring s’est certes légèrement améliorée dans cette nouvelle version, mais l’écart de tarif avec les autres « voitures électriques pas chères », s’est considérablement réduit.

Verdict de l’essai :

La Dacia Spring progresse, mais elle ne fait pas de miracle. Malgré son poids plus de 975 kg et un joli tour de passe-passe qui permet à son moteur de passer de 45 ch à 65 ch, elle peine à justifier un tarif aussi élevé. À 22 300 euros au bas mot, elle reste toujours l’électrique la moins chère du marché, mais l’écart s’est considérablement réduit avec des voitures légèrement plus chères, mais meilleures en tous points. Pour autant, si votre critère principal reste le prix, force est de constater qu’une fois encore Dacia n’a pas de concurrence et qu’à ce titre l’achat d’une Spring Extreme peut s’entendre, du moins pour le moment. La donne pourrait changer si la citadine de fabriquée en Chine, n’est plus éligible au bonus écologique en 2024, ce qui lui pend au nez.

Source: 01net