En Suède, les " fleurs de mai " d’un jeune sans-papiers suscitent un élan d’antiracisme

April 26, 2023
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Murhaf Hamid, 12 ans, né en Suède où il n’a aucun statut légal, avec un pin’s « fleur de mai », à Glimakra, en Suède, le 25 avril 2023. JOHAN NILSSON/TT / AFP

Avec ses majblommor, les « fleurs de mai » vendues par les petits Suédois chaque année en avril au profit d’une association caritative, Murhaf Hamid, 12 ans, espérait faire un bénéfice de 100 couronnes (autour de 10 euros). De quoi acheter un billet de bus et se payer une pizza avec ses copains, à Kristianstad, la grande ville à 35 kilomètres de son village de Glimakra, dans le sud du pays.

Quelques jours après avoir débuté son démarchage, le voilà à la tête d’une petite fortune, porté par un élan de solidarité sans précédent et érigé en icône de la lutte contre le racisme, dans une société suédoise plus polarisée que jamais. Les commentaires haineux qui ont ponctué son aventure caritative ont en effet amené la plupart des leaders politiques à s’engager à lui acheter une fleur. Même si tous ont pris soin de ne pas évoquer sa situation.

Car Murhaf a beau être né en Suède et y avoir vécu toute sa vie, il n’y a aucun statut légal. La demande d’asile déposée par sa mère, d’origine éthiopienne, a été rejetée. Interdite de séjour, mais ne pouvant être renvoyée dans son pays, elle vivote donc à Glimakra, avec ses trois enfants. Murhaf est l’aîné. Ce sont ses amis qui l’ont convaincu de vendre des majblommor pour se faire un peu d’argent de poche.

Un appel sur Facebook

Depuis 1907, ces « fleurs de mai » sont vendues par les élèves de 10 à 12 ans, sous forme de badges, d’autocollants ou en ligne. Ils gardent 20 % de la somme – la moitié pour le vendeur, l’autre pour le groupe qu’il représente – et reversent les 80 % à l’association Majblomman, qui vient en aide aux familles dans le besoin.

Muni de son sac rempli de fleurs, Murhaf a donc arpenté les rues de son village, la semaine dernière. En vain : à part quelques commentaires hargneux – liés à sa couleur de peau, pense-t-il –, il n’a vendu que deux fleurs. Apprenant ses déboires, la coordinatrice asile qui s’occupe de sa famille, Leila Orahman, a lancé un appel sur Facebook, avec un lien vers le compte de Murhaf.

Deux jours plus tard, il avait récolté 200 000 couronnes (17 500 euros). Une prouesse saluée par un article dans le quotidien régional Sydsvenskan, où le gamin expliquait qu’il aurait aimé « acheter un titre de séjour », mais comme « ce n’était pas possible », il se contenterait d’une nouvelle paire de chaussures, de quelques vêtements neufs et de cadeaux pour sa famille.

Partagé sur les réseaux sociaux, l’article a suscité une volée de commentaires haineux, dont deux, en particulier, ont retenu l’attention, étant donné leur caractère ouvertement raciste et le fait que leurs auteurs affirmaient être membres du parti d’extrême droite des Démocrates de Suède (SD). Ce parti, influent auprès de la coalition gouvernementale élue en septembre sur la promesse de restreindre l’accueil des demandeurs d’asile et d’expulser les sans-papiers, a jugé les messages contre le jeune Murhaf « totalement inacceptables ».

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Source: Le Monde