Production, navigation, sécurité... Comment se porte le premier parc éolien en mer de France?

May 31, 2023
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Il rassemble 80 éoliennes installées dans l’océan atlantique, à 12 km environ des côtes. Au large de La Baule et du Croisic (Loire-Atlantique), le parc éolien dit de Saint-Nazaire a été entièrement mis en service le 23 novembre. Le site était particulièrement attendu puisque sa livraison accusait plusieurs années de retard et qu’il était, surtout, le tout premier de France. Il ne devrait pas le rester longtemps puisque trois autres sont actuellement en chantier (Saint-Brieuc, Fécamp, Courseulles-sur-mer). Le point sur les six premiers mois d’activité.

Une production « un peu au-dessus » des prévisions

C’est le groupe EDF qui est chargé de l’exploitation des éoliennes du parc de Saint-Nazaire, lequel est doté officiellement d’une puissance de 480 MW, l’équivalent de 20 % de la consommation électrique annuelle du département de la Loire-Atlantique. Qu’en est-il réellement depuis six mois ? « La production n’a connu aucun incident et est tout à fait conforme aux prévisions », se félicite Marc Chiron, directeur adjoint d’exploitation off shore chez EDF Renouvelables. En moyenne, un peu plus de 160 GWh ont ainsi été injectés sur le réseau, l’équivalent de la consommation d’environ 700.000 habitants. Un pic à 195 GWh a même été atteint en mars. Compte tenu des aléas météo et de maintenance, les éoliennes ne tournent pas 24h/24 mais plutôt « 80 à 90 % » du temps, selon EDF. Et lorsqu’elles tournent, elles ne développent pas la même puissance. « Il est normal qu’il y ait des variations de production. Ce que nous disent les études de vent réalisées, c’est que, sur une année, la production réelle devrait correspondre à 40 % de la puissance maximale du site. Pour l’instant, on est dans les clous, on est même un peu au-dessus. » Ce calcul, qu’on appelle le facteur de charge, avoisine 25 % pour l’éolien terrestre.

La navigation autorisée mais très encadrée

Immense (78 km2 au total), le parc éolien de Saint-Nazaire peut être traversé par des bateaux, qu’ils soient de pêche, de marchandises ou de tourisme. Mais la navigation y est strictement réglementée. Un nouvel arrêté du préfet maritime vient d’ailleurs d’être adopté avant la saison estivale. Celui-ci interdit tout navire d’une longueur d’au moins 25 mètres. Il est également interdit d’approcher à moins de 50 mètres d’une éolienne, sachant qu’elles sont séparées d’un kilomètre chacune, et d’approcher à moins de 200 m de la sous-station électrique, sorte de poste de transformation du site. La vitesse est limitée à 12 nœuds (22 km/h), l’activation d’un système d’identification automatique (AIS) est obligatoire en cas de mauvaise visibilité, le mouillage n’est pas permis, de même que la baignade. La plongée sous-marine, appréciée en raison des fonds rocheux du secteur, reste très encadrée. « Nous sommes convaincus que le parc, qui fait partie du domaine public, doit rester accessible. Pour le moment la navigation est très modérée. Mais on se doute qu’elle va augmenter avec les beaux jours. Il est donc important de rappeler les règles. Est-on trop permissif ou pas assez ? Il faudra s’ajuster au bout de plusieurs mois », estime Jean-Michel Chevalier, adjoint au préfet maritime de l’Atlantique.

Situées à 12 km des côtes, les éoliennes du parc de Saint-Nazaire sont au nombre de 80. - F.Brenon/20Minutes

La sécurité prise très au sérieux

Compte de son importance et de sa vulnérabilité, le parc éolien est surveillé en permanence depuis la base EDF de La Turballe, sur la côte. Des bateaux de maintenance se trouvent régulièrement sur le site, surtout en été. Des caméras et équipements radio sont également positionnés sur les éoliennes et la sous-station. Des plaisantins voulant s’amarrer aux mâts ou des activistes voulant y grimper ne passeraient « pas inaperçus » assurent les autorités. Les infractions sont délictuelles et feront l’objet de poursuites devant le tribunal maritime, ajoutent-elles. « Aucun incident n’a été constaté, indique l’adjoint au préfet maritime de l’Atlantique. Le champ peut paraître proche de la côte mais, en réalité, 12 kilomètres c’est très loin pour des plaisanciers. Il faut, de plus, un permis hauturier pour naviguer jusque-là. » En cas d’accident, les secours sont coordonnés par le centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (Cross). Avec une « formation spécifique » et des « exercices » pour les pilotes d’hélicoptère compte tenu de la hauteur (180 m en bout de pale) et de la dangerosité des éoliennes.

L’impact sur la faune, trop tôt pour tirer des conclusions

Le sujet de l’impact sur la faune marine est regardé de près par les associations environnementales. Si les travaux ont effectivement généré une dégradation des fonds marins et des nuisances pour la vie sauvage, EDF se veut rassurant. « L’état initial du milieu est très bien connu, rapporte Marc Chiron. Un suivi régulier et précis de l’évolution est mis en place avec des experts indépendants, notamment au moyen de robots et plongeurs. Il est trop tôt pour conclure de l’impact environnemental mais on assiste déjà à une recolonisation par certaines espèces attirées par espèces l’accumulation d’organismes qui se fixent sur les fondations. C’est l’effet récif, comme sur les épaves. » La transparence de l’eau, troublée par les forages du chantier, est revenue à la normale. Des groupes de dauphins de plus d’une vingtaine d’individus ont été aperçus sur le parc. Quant aux 46 espèces d’oiseaux identifiées dans le secteur, elles font aussi l’objet d’un suivi. Le risque de collision existe même si la majorité d’entre elles volent jusqu’à 30 mètres au-dessus du niveau de la mer, soit au-dessous des pales d’éoliennes.

La vue, impressionnante au pied, critiquée sur la côte

Lorsqu’on navigue au milieu du parc éolien, la hauteur des installations est très impressionnante, surtout lorsqu’un navire croisant dans le secteur permet d’en comparer les dimensions. Sur la côte, la visibilité des éoliennes est faible ou nulle en cas de brume ou mauvais temps. Mais lorsque le ciel est dégagé, comme c’est le cas depuis plusieurs jours, la vision du parc sur la ligne d’horizon est incontestable depuis l’île de Noirmoutier (Vendée), au sud, jusqu’à Belle-île (Morbihan), au nord. Une nouveauté qui déçoit de nombreux habitants, ainsi que les professionnels du tourisme. « L’impact visuel est quand même très fort. Nettement plus que prévu. Y compris la nuit avec des lumières permanentes. Notre côte sauvage n’a plus rien de sauvage », regrette Michèle Quellard (DvD), maire du Croisic. « Je pense qu’on s’habitue déjà, moi je n’y fais plus attention », nuance Camille, propriétaire d’une résidence à la Turballe (Loire-Atlantique).

Source: 20 Minutes