Fusionner carte Vitale et carte d’identité ? Pas la panacée pour lutter contre la fraude

June 02, 2023
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Fusionner la carte Vitale et la carte d’identité, utile pour lutter contre la fraude ? C’est ce qu’a avancé mardi Gabriel Attal. Le ministre délégué aux Comptes publics n’a pas encore dévoilé les modalités de la mesure, mais entend avec cette annonce renforcer la lutte contre la fraude, qui était déjà un des objectifs du dernier projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Le sujet de la fraude aux prestations sociales agite le débat public depuis de nombreuses années et les rapports sur la question s’empilent.

Cette proposition de fusion n’est qu’une des mesures possibles pour lutter contre la fraude. Un chantier est d’ailleurs en cours, comme le rappelle la Cour des comptes, pour que des agents des organismes de protection sociale puissent accéder directement à des données d’état civil à travers une plateforme reliée aux mairies et aux préfectures.

De « très fortes réserves »

Dans un courrier révélé ce jeudi, la Caisse primaire d’Assurance maladie (CPAM), a émis de « très fortes réserves » sur l’impact d’une telle mesure. La fraude est en effet multiple et difficile à caractériser, comme le reconnaissait le directeur général de l’Assurance maladie, Thomas Fâtome, dans un dossier de presse en septembre : « Il n’y a pas une fraude à l’Assurance maladie mais des fraudes multiples et diverses : facturation de prestations fictives ou surfacturées, usurpation d’identité de professionnels de santé ou d’assurés pour détourner des remboursements, fausses déclarations sur les ressources, falsifications d’ordonnances… » Le montant est difficile à estimer, du fait de la nature mouvante de la fraude. Il est aussi parfois difficile de distinguer ce qui relève de la fraude ou bien de l’erreur ou de la négligence.

L’Assurance maladie ne dispose que d’une photographie partielle de la fraude. Elle estime que près des 2/3 des fraudes qu’elle détecte proviennent des professionnels de santé. En cause, « le non-respect de la réglementation ou de la nomenclature, des actes fictifs ou encore des fraudes à la prescription ». Un point en partie contesté par des médecins, qui dénoncent une gabegie administrative prise pour des fraudes.

L’Assurance maladie a aussi renforcé les contrôles des assurés, qui est l’objectif de la mesure présentée par Gabriel Attal. Elle rappelle que depuis la fin de l’année 2018, il n’y a plus de cartes Vitale activées en circulation en excès par rapport au nombre d’assurés. La CPAM fait aussi appel à des outils informatiques afin de détecter des irrégularités. Elle va également renforcer ses outils d’échanges de données avec d’autres organismes. L’Assurance maladie entend également mieux contrôler les arrêts maladie. Toutefois, un rapport parlementaire soulignait en 2019 que le nombre de médecins-conseils, qui peuvent vérifier la validité d’un arrêt, a diminué de 22 % en dix ans.

Gabriel Attal n’a pas précisé comment pourrait s’appliquer une telle fusion. L’annonce pourrait bien être un feu de paille, alors que le directeur général de la CPAM a estimé dans un courrier d’avril et révélé ce jeudi que la « plus-value en matière de lutte contre la fraude [d’une telle mesure] reste entièrement à démontrer », puisque « les montants de fraude susceptibles d’être liés à une utilisation frauduleuse de la carte Vitale sont minimes ». Et c’est un autre projet, en cours de déploiement, qui concentre actuellement les efforts de la CPAM : depuis 2019, une version dématérialisée de la carte Vitale est progressivement déployée sur tout le territoire. Une autre façon de renforcer la sécurité de cet outil.

Source: 20 Minutes