Ukraine: la guerre des drones

RFI
June 04, 2023
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Attaques de drones ukrainiens sur Moscou, essaims de drones russes sur Kiev, mini-drones sur la ligne de front… Dans la guerre d’Ukraine, les drones sont partout. Jamais un conflit n’a rassemblé autant de ces machines qui viennent bouleverser les tactiques militaires.

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Bien moins chers que des missiles, les drones créent en permanence la menace, la terreur ou encore l’incertitude dans tous les compartiments du champ de bataille, pointe Léo Péria-Peigné chercheur à l’Ifri, l’Institut français des relations internationales : « Vous avez deux armées qui ont du mal à couvrir l'ensemble du front, tout simplement parce que ni l'un ni l'autre n'est vraiment assez nombreuse pour faire une ligne totalement pleine comme c'était le cas pendant la Première Guerre mondiale. Vous avez des môles de résistance, des môles armés et les interstices vont être couverts par des drones qui vont permettre de repérer un mouvement adverse. Ça, c'est la version défensive. La version plus offensive va être armée, souvent légèrement, pour aller porter le feu en face et mener une sorte de harcèlement constant et permanent qui oblige l'adversaire à se tenir sur ses gardes. Ensuite vous avez des drones plus performants, avec des portées plus importantes qui vont pouvoir se déployer notamment sur Moscou. Il y a quelques mois, d’anciens drones soviétiques à réaction ont été modifiés pour devenir des bombes volantes, afin d’être utilisé à cet effet. »

Le Lancet 3 : un drone rustique et efficace

Dès le début de la guerre, les Ukrainiens ont un coup d’avance : ils généralisent l’usage des drones, utilisant massivement des petits drones civils modifiés. Mais l’armée russe a depuis comblé son retard, en s’appuyant notamment sur le drone suicide Lancet 3. Rustique, peu coûteux, il est aussi, relève Léo Péria-Peigné, particulièrement efficace : « Aujourd'hui, le Lancet, malgré une charge utile un petit peu faible est quand même très utile pour faire ce que l’on appelle : la contre-batterie. En gros, il va détecter les départs de feu adverses et il va aller se crasher et détruire ou essayer de détruire les canons adverses. C'est comme ça que, au moins un des deux Caesars (canon automoteur français de 155 mmm) qui a été détruit et reconnu comme détruit, a été attaqué. »

« Le drone, c’est la star de ce conflit » Michel Goya

Régulièrement, Moscou envoie des salves de drones suicides iraniens Shahed sur les arrières ukrainiens. Kiev fait de même en frappant le territoire russe dans la profondeur, notamment avec le drone Furia. Mais c’est au plus près du front que l’on retrouve le plus de drones. On est passé en Ukraine, souligne l’historien militaire Michel Goya, à une échelle jamais observée jusque-là : « L'armée ukrainienne, c'est l'armée la plus dronisé du monde, très largement. Les Russes s'y mettent aussi, ce qui rend d'ailleurs les choses plus compliquées. Un élément un peu nouveau de ce conflit, c'est une sorte de transparence du champ de bataille. Il est très difficile de monter des opérations de grande ampleur parce qu'elles sont rapidement visibles. Le ciel est dangereux pour les appareils pilotés (hélicoptères, avions de combat). En revanche, le ciel est peuplé de machines qui remplissent beaucoup de missions de l'aviation. Ils font du renseignement, ils font de la reconnaissance, ils font de la frappe et on peut imaginer l'attaque de la ligne fortifiée dans la province de Zaporijia précédée d’essaims de drones qui vont harceler les arrières russes. Ou inversement, les Russes qui vont essayer, en utilisant leurs drones, d'entraver toutes les opérations offensives ukrainiennes. Oui, le drone, c'est la star de ce conflit, incontestablement. »

Conséquence : les pertes de drones sont aussi très élevées, chaque drone, disent les experts, ne vole pas plus de 4 à 6 fois avant d’être abattu.

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Source: RFI