Pologne : Manifestation massive à Varsovie contre le gouvernement
Ils sont descendus en nombre pour faire entendre leurs voix. Un demi-million de Polonais ont manifesté ce dimanche dans les rues de Varsovie contre le gouvernement nationaliste populiste au pouvoir, à quelques mois des élections législatives d’automne, ont annoncé les organisateurs. « L’Hôtel de ville estime [la participation] à 500.000 en ce moment », a déclaré à l’AFP Jan Grabiec, le porte-parole des organisateurs de la grande marche, qui semble être la plus importante dans ce pays depuis la chute du communisme en 1989.
Venus de toute la Pologne, les manifestants - arborant les couleurs polonaises blanc et rouge et celles de l’Union européenne - ont répondu à l’appel du chef du principal parti d’opposition centriste (Plateforme civique, PO), l’ancien chef du Conseil européen Donald Tusk, pour protester contre « la vie chère, l’escroquerie et le mensonge, en faveur de la démocratie, des élections libres et de l’UE ». Les dirigeants de la majorité des partis d’opposition ont encouragé leurs partisans à rejoindre la grande marche contre le parti nationaliste populiste au pouvoir, Droit et Justice (PiS), son chef Jaroslaw Kaczynski et ses alliés.
« La démocratie meurt en silence »
« Ça suffit ! », « On ne veut pas une Pologne autoritaire », « Le PiS c’est la vie chère », clamaient des pancartes dirigées contre la majorité au pouvoir en Pologne depuis bientôt huit ans. « Notre gouvernement est autoritaire. Ils veulent faire de la Pologne un pays qui ressemble à la Russie », a déclaré à l’AFP Karolina Sieminska, étudiante en français de 22 ans. Des cœurs blanc et rouge collés sur la poitrine, les responsables de la PO ont conduit la marche le long de la Voie royale dans la capitale polonaise, en compagnie du leader légendaire du premier syndicat libre du monde communiste dans les années 1980 Lech Walesa, prix Nobel de la paix en 1983.
Longtemps absent de la scène politique, Lech Walesa a indiqué avoir attendu « patiemment » le jour où le parti nationaliste et son leader Kaczynski devront s’en aller. « M. Kaczynski, on est venu vous chercher. Ce jour est bien arrivé », a-t-il estimé.
Dans son discours, Donald Tusk, la bête noire du pouvoir en place, a souligné que l’actuelle mission de l’opposition est « d’importance comparable » à celle des années 1980 et la lutte contre le communisme à l’époque. « La démocratie meurt en silence. A compter d’aujourd’hui, il n’y aura plus de silence », a-t-il lancé devant une marée humaine serrée au seuil de la Vieille ville, sous un soleil magnifique. « Pour que la démocratie ne meure pas, malgré les attentats quotidiens du PiS de Kaczynski contre ses bases mêmes », a-t-il précisé.
Une date d’anniversaire historique
La majorité des sondages prévoient une victoire électorale du PiS, crédité d’environ 30-35 % des intentions de vote, mais sans obtenir une majorité. Si les différents partis d’opposition gardent leur taux de soutien actuel et s’avèrent capables de s’entendre, ils ont toutes les chances de prendre le pouvoir. Selon Piotr Mroz, 62 ans, travailleur du bâtiment, qui a fait près de 600 km pour venir à Varsovie depuis sa ville de Szczecin (nord-ouest), « si ça ne change pas maintenant on aura ici la Hongrie ou la Turquie », pays souvent accusés de violations de règles démocratiques.
Dans un commentaire sarcastique, le chef du gouvernement en place, Mateusz Morawiecki, a tenté de tourner en dérision l’importance du rassemblement qu’il a comparé à « du cirque ». « Cela me fait rire un peu quand les vieux renards qui sont dans la politique depuis des années, organisent une marche antigouvernementale et la présentent comme une protestation civique spontanée », a-t-il déclaré cité par l’agence PAP.
La date de la manifestation, que l’opposition considère comme un moment décisif dans sa marche vers une éventuelle victoire électorale, est celle du 34e anniversaire des premières élections partiellement libres en Pologne, qui ont précipité la chute du communisme en Europe. Le mouvement de Lech Walesa avait alors réussi à placer 160 de ses candidats à la Chambre basse, raflant ainsi la quasi-totalité des sièges auxquels il pouvait prétendre, soit 35 % des mandats de cette assemblée, et 99 % de l’ensemble des postes de sénateurs.
Source: 20 Minutes