Comment cet entrepreneur chinois a contourné les droits de douane européens pendant des années

June 05, 2023
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Mis en examen et incarcéré, le fondateur et patron de la société de bicyclettes Leon Cycle aurait économisé près de 26 millions d'euros à l'insu des douanes européennes.

Lijun D. s'est finalement fait rattraper par la patrouille. Suspecté de fraude de haute volée, ce chef d'entreprise chinois est tombé dans les filets du procureur européen. Depuis 2018, il aurait «mis en œuvre un système de contournement des droits de douane européens, pour un préjudice évalué à hauteur de 26 millions d'euros», affirment nos confrères du Parisien, à l'origine de ces révélations confirmées par l'AFP. À 43 ans, Lijun D. est à la tête de Leon Cycle, une multinationale allemande en tête de gondole du marché du vélo électrique mondial. Interpellé mercredi dernier par les douaniers du Service d'enquêtes judiciaires des finances (SEJF), Lijun D. a rapidement été placé en garde à vue, avant d'être mis en examen vendredi et finalement écroué à la prison de la Santé.

Pourtant, mettre le grappin sur le PDG de Leon Cycle n'a pas été chose facile. Car il faut dire que le système de contournement de droits de douane mis en place semble bien huilé. Les douaniers auraient découvert le pot aux roses par hasard. Au détour d'un simple contrôle, les douaniers constatent des irrégularités sur les marchandises importées par le géant du cycle. Après des investigations, les douanes judiciaires découvrent que les vélos électriques en question ont été fabriqués en Chine, alors qu'ils étaient estampillés comme venant de Corée du Sud. Les droits d'entrées de marchandises dans l'Union Européenne n'étant pas les mêmes d'un pays à l'autre, Leon Cycle bénéficiait d'un allégement des droits de douane.

À cette arnaque à l'origine s'en ajouterait une seconde. «Les bicyclettes sont également livrées en kit, en faisant croire qu'il s'agit de pièces détachées. Une nuance qui permet aussi de payer une taxe sur la valeur ajoutée (TVA) bien inférieure», note le Parisien. Une fois les barrières douanières de l'Union européenne franchies, les kits seraient assemblés en République tchèque, en Roumanie ou encore au Portugal croit savoir le quotidien francilien. De tels assemblages finaux permettraient alors aux vélos d'être vendus comme produits fabriqués en Europe.

Pour couronner et verrouiller ce système, l'argent frauduleux produit serait in fine blanchi. «Leisger Holdings Limited, « la holding principale » de Leon Cycle, est immatriculée aux îles Caïmans, un paradis fiscal notoirement connu», pointe du doigt Le Parisien.

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Mais ces suspicions accablantes ne sont que des «extrapolations», s'insurge Me Flahaut-Prévot, l'avocat de Lijun D. Le conseil s'inquiète de voir son client devenir «l'enjeu d'une guerre commerciale entre l'Europe et la Chine», à l'heure où l'Union Européenne tente de resserrer les vis de son système douanier. « Si le dossier des douanes sur le contournement des droits antidumping est présenté comme incontournable par l'accusation, la plupart des éléments peuvent être contestés », renchérit-il dans les colonnes du Parisien, ajoutant que « sur le blanchiment, il n'y a rien. Le parquet européen fait une extrapolation parce que la holding principale se trouve aux îles Caïmans. Monsieur D. est un homme d'affaires à la situation stable qui n'a pas sa place en détention ». Le suspect, déjà mis en cause en Allemagne pour des faits similaires, s'est lui-même défendu en affirmant aux douaniers du SEJF qu'«il n'y a pas d'infraction», «aucun montage pour tenter de contourner les droits de douane».

Source: Le Figaro