Hongrie : la France prête à participer au projet de centrale nucléaire du russe Rosatom
Le chantier de construction d’une extension de la centrale nucléaire de Paks, en Hongrie, le 10 septembre 2022. ATTILA KISBENEDEK / AFP
En pleine guerre en Ukraine, l’implication d’opérateurs français dans la construction de deux réacteurs nucléaires en Hongrie pilotée par le groupe public russe Rosatom peut paraître inopportune. L’extension de la centrale de Paks, dans le centre du pays, fait pourtant l’objet de discrètes discussions entre Paris et Budapest et a même été abordé lors d’un dîner entre Emmanuel Macron et le premier ministre Viktor Orban à l’Elysée, le 13 mars.
Peu après, le ministre hongrois des affaires étrangères, Peter Szijjarto, a confirmé que la Hongrie comptait sur l’aide de la France afin de contourner les réticences allemandes à livrer le système de contrôle des réacteurs, initialement confié, depuis 2019, à un consortium constitué de Siemens Energy et de Framatome. « Puisque le gouvernement allemand bloque pour des raisons politiques la participation contractuelle de Siemens Energy, nous souhaitons donc nous appuyer davantage sur les Français », a affirmé M. Szijjarto.
Si les dirigeants français et hongrois s’opposent sur différents sujets européens, comme la question de l’Etat de droit ou les livraisons d’armes à Kiev, ils partagent une croyance commune dans le nucléaire. M. Szijjarto s’est même rendu le 13 mars à Flamanville (Manche) pour visiter le chantier de l’EPR. « Le gouvernement français a donné l’autorisation à Framatome, mais le gouvernement allemand ne l’a pas fait pour Siemens. Nous étudions donc aujourd’hui ce problème en étroite collaboration avec Framatome », indique une source hongroise à propos de la centrale de Paks.
Accord avec Vladimir Poutine
« Les acteurs français de l’industrie nucléaire appuient nos partenaires européens, et notamment la Hongrie, dans toutes leurs démarches et dans tous les projets qu’ils portent sur leur sol dès lors qu’ils respectent strictement le cadre européen des sanctions internationales », dit au Monde l’entourage d’Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique. Or, « à ce jour, les sanctions européennes [contre la Russie] ne visent pas l’industrie nucléaire, rappelle le ministère. Si des acteurs français souhaitent s’engager dans des partenariats avec d’autres acteurs européens, nous n’allons pas les en empêcher ».
L’empressement à honorer le contrat semble aujourd’hui beaucoup plus modéré du côté allemand, dans le contexte de la guerre en Ukraine et de la sortie du nucléaire. Le gouvernement de coalition, majoritairement opposé à l’atome, ne fait pas de commentaire, mais Siemens Energy a confirmé que sa demande de licence d’exportation était toujours en attente de traitement par Berlin. « L’Office fédéral allemand de l’économie et du contrôle des exportations n’a pas encore délivré de licence d’exportation, c’est pourquoi il n’y a pas eu de livraison », déclare au Monde un porte-parole de l’entreprise, située à Munich. Autre élément peu incitatif du point de vue de l’industrie outre-Rhin : les trois dernières centrales sur le sol allemand sont désormais hors service, depuis la mi-avril, douze ans après la décision d’abandon du nucléaire prise à l’initiative de l’ex-chancelière allemande, Angela Merkel, au lendemain de la catastrophe de Fukushima, au Japon.
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Source: Le Monde