À Carnac, 37 menhirs détruits pour un Mr Bricolage
« Il ne reste rien du tout sur place ». Christian Obeltz, correspondant de la Drac et collaborateur du CNRS de Nantes, est consterné. « Il y a trois semaines, je suis passé en voiture. C’est là que j’ai vu que tout avait été détruit ». Il fait référence au site du chemin de Montauban, à Carnac, qui comprenait 37 menhirs, aujourd’hui disparus.
« Ils partaient d’une zone humide en pointant vers le sommet de la petite bute naturelle. Il y avait quelques autres blocs dans un mur sécant, mais qui n’étaient pas à leur place d’origine », détaille-t-il. « Le permis de construire pour établir un magasin Mr Bricolage a été signé. Du jour au lendemain, un bulldozer est arrivé et c’était terminé, retrace-t-il. C’est inouï. »
Interrogé sur cette destruction, Olivier Lepick, maire de Carnac répond qu'« un permis a bien été délivré par Carnac, mais aussi par les services de l’État. Il n’y avait pas de prescriptions de fouilles archéologiques sur cette zone, il n’y a donc pas de raison de croire qu’il y avait un site archéologique majeur à cet endroit. Sinon, on n’aurait évidemment pas délivré le permis », assure-t-il. Et de poursuivre : « Vous imaginez bien qu’en tant que maire, qui plus est à la tête de l ‘association Paysages de Mégalithes , je respecte scrupuleusement la loi ».
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Pourtant, selon Christian Obeltz, le site était bel et bien prescrit. « Le numéro de l’entité archéologique est le 56 034. Il est référencé depuis 2015 sur l’Atlas des patrimoines, qui est géré par le ministère de la Culture », affirme-t-il. Et de poursuivre : « D’autres sites archéologiques ont été fouillés sur ce même secteur, notamment un tumulus au nord, qui est répertorié sur le PLU de Carnac. Rien que cela, ça impose une prescription », indique-t-il.
La Drac, la préfecture et le maire s’expliquent
Suite à nos sollicitations, mardi soir, la Drac, la préfecture du Morbihan et la mairie de Carnac ont réagi conjointement. « Le 11 décembre 2014, la Drac a été saisie pour avis d’une demande de permis pour la construction d’un supermarché Chemin de Montauban à Carnac. La réalisation d’un diagnostic archéologique préalable a été prescrite. Cette opération, en mars 2015, a consisté en l’ouverture de huit tranchées de 3 m de large, sur un terrain partiellement encombré de déblais, de déchets divers ou de bosquets. Aucun vestige archéologique n’a été mis au jour. Par contre, il est apparu que deux anciennes clôtures dissimulées dans les taillis étaient constituées de blocs dressés reliés par des murets de pierre sèche ». « Il était difficile, à ce stade des recherches, de caractériser ces découvertes. Dans l’une des clôtures, dénommée file 2 dans le rapport, les blocs qui ne présentent pas de traces d’usure caractéristiques de leur implantation durant des millénaires, ont manifestement été déplacés pour construire le muret. Il ne s’agit donc pas d’une file de menhirs en place », explique le communiqué.
« L’autre ensemble, dénommé file 1 dans le rapport, est d’interprétation plus complexe. Si aucune fosse de calage n’a été mise au jour, ces blocs sont néanmoins implantés plus profondément dans la terre, leur base posée sur le substrat. Quatre d’entre eux présentent les marques d’une usure de ces blocs en position dressée depuis très longtemps. L’hypothèse de vestiges d’une file de petits menhirs peut donc être posée, sans être à ce stade formellement établie ».
Le communiqué précise qu'« aucune suite n’a été donnée par le maître d’ouvrage à la prescription de fouille émise par la Drac, le permis de construire de ce supermarché ayant été refusé en raison de hauteur sous faîtage non réglementaire et de la présence d’une zone humide. Depuis, la mairie de Carnac a été saisie d’une nouvelle demande de permis de construire au même emplacement. Dans le cadre de l’instruction d’urbanisme et des documents réglementaires en vigueur, ce dossier a fait l’objet d’un examen minutieux par les services de la Drac. »
Source: Le Télégramme