Au Royaume-Uni, la famille Barclay perd le contrôle du " Daily Telegraph "
Humiliante fin de partie pour la famille Barclay. Mercredi 7 juin, les milliardaires britanniques ont perdu le contrôle de leurs joyaux dans le secteur de la presse : le Daily Telegraph, le grand quotidien britannique de droite, et le Spectator, hebdomadaire influent dans les milieux proches du parti conservateur. Ces deux médias « pourraient » être mis en vente, selon AlixPartners, le mandataire judiciaire.
La famille Barclay était en défaut de paiement depuis plusieurs années sur une importante dette qu’elle devait à Lloyds Banking Group. Après de longues négociations, alors qu’il « n’y avait aucun signe qu’un remboursement aurait lieu », la banque britannique a perdu patience. Elle a mandaté AlixPartners pour prendre le contrôle de B.UK, la holding de la famille enregistrée aux Bermudes, qui possède indirectement les groupes de presse. Dans la foulée, tous les membres et représentants de la famille Barclay ont perdu leurs sièges dans les différents conseils d’administration contrôlant ces médias.
L’épopée des frères Barclay est si romanesque qu’elle a inspiré une pièce de théâtre en France. Les jumeaux, nés pauvres à Londres en 1934 dans une famille de huit enfants, ont progressivement construit un empire qui allait de la marine marchande aux hôtels de luxe – dont le Ritz à Londres – en passant par une entreprise de livraisons de colis. Les deux frères, spécialistes des montages financiers, fuyaient tellement la publicité qu’aucune photo publique d’eux n’est disponible depuis 2000. Régulièrement accusés d’évasion fiscale, ils vivaient entre Monaco et un château sur l’île de Brecqhou, un caillou inhabité d’un kilomètre de long dans la Manche. En 2004, ils avaient mis la main sur le Daily Telegraph et le Spectator, et ils avaient régulièrement été soupçonnés d’essayer d’influencer la ligne éditoriale.
Brouille familiale
Mais l’histoire se termine mal. En janvier 2021, David Barclay est décédé du Covid-19. Frederick, son jumeau, a été poursuivi en justice par sa femme dans une coûteuse procédure de divorce et il a été condamné, en mai 2021, à lui verser 100 millions de livres (116 millions d’euros). Une vaste brouille familiale semble s’être ajoutée à l’affaire : en 2020, Frederick et sa fille Amanda ont poursuivi en justice les trois fils de David, les accusant d’avoir installé des micros au Ritz pour les espionner.
Face à la cascade d’entreprises offshore détenant les actifs familiaux, il est difficile de savoir pourquoi le prêt dû à Lloyds Banking Group n’a pas été honoré. Mais la conséquence est claire : deux importants journaux britanniques sont sur le marché. Le Telegraph, en particulier, est en excellente santé financière, avec 750 000 abonnés, un chiffre d’affaires de 245 millions de livres et un bénéfice net de 16,7 millions de livres. Le quotidien pro-Brexit, qui a longtemps publié les chroniques très lues d’un certain Boris Johnson, devrait intéresser beaucoup de monde.
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Source: Le Monde