Dans la région espagnole de Castille-et-Léon, l’extrême droite exploite la colère des agriculteurs

June 08, 2023
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Le leader du parti d’extrême droite Vox, Santiago Abascal, lors d’une réunion de campagne aux arènes de San Sebastian de los Reyes, près de Madrid, le 24 avril 2021. OSCAR DEL POZO / AFP

« Les politiques, dans un acte d’irresponsabilité maximale, ont publié une loi que même le plus grand des ignares savait intenable. » Le Collège officiel des vétérinaires de Salamanque pouvait difficilement publier un communiqué plus sévère que celui qu’il a rendu public, mercredi 7 juin, contre le gouvernement régional de Castille-et-Léon. Déjà, une semaine plus tôt, il l’accusait d’avoir mis en danger la « santé des personnes et des animaux » et la « réputation commerciale » de ses exportations. En cause : une nouvelle norme qui assouplit les contrôles sanitaires sur la tuberculose bovine et entre en contradiction avec la législation espagnole et européenne.

Tenue depuis plus d’un an par la première coalition signée en Espagne entre le Parti populaire (PP, droite) et le parti d’extrême droite Vox, la région avait voulu satisfaire, à deux semaines des élections locales du 28 mai, une demande ancienne et récurrente des éleveurs. Dans la province de Salamanque, située à 200 kilomètres à l’ouest de Madrid – où se trouve le cheptel le plus important d’Espagne –, le taux d’incidence de la tuberculose bovine a presque doublé entre 2021 et 2022, passant de 2,5 % à 4,5 % du bétail affecté.

Alors que d’autres provinces de la région, comme celles de Léon ou de Valladolid, sont parvenues à se débarrasser de la maladie, à Salamanque, les éleveurs considèrent que les mesures, basées sur des tests de dépistage réguliers et très sensibles, l’assainissement par abattage des troupeaux infectés et la désinfection des installations, ont eu « un résultat lamentable ». Selon eux, le problème résiderait principalement dans la cohabitation des élevages extensifs avec la faune sauvage.

Protestation après un semi-confinement du bétail

Le 15 mai, faisant fi des normes nationales, Vox a donc assoupli les protocoles, forçant le gouvernement espagnol à déposer un recours devant le Tribunal supérieur de justice de Castille-et-Léon, assorti d’une demande de suspension préventive et urgente de la norme afin de ne pas risquer une propagation de la maladie. « On ne peut pas nier la réalité scientifique », a insisté le ministre espagnol de l’agriculture, le socialiste Luis Planas.

« Nous devons rendre compatible la sécurité alimentaire et la protection de nos éleveurs, avait déclaré quelques jours plus tôt le vice-président (Vox) de Castille-et-Léon, Juan Garcia-Gallardo, devant le siège de la Commission européenne à Bruxelles. Les agriculteurs ne supportent plus les impositions vertes, bureaucratiques et arbitraires… » Sur Twitter, il s’est laissé aller à ces envolées patriotiques dont la formation est friande : « Nous allons défendre nos éleveurs. A Bruxelles et à Madrid. Aujourd’hui et toujours. Pour notre campagne, pour notre avenir. Pour Castille-et-Léon. Pour l’Espagne. »

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Source: Le Monde