L’Etat reprend 100 % d’EDF, mais les défis demeurent

June 08, 2023
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Le PDG d’EDF, Luc Rémont, lors de la visite par Bruno Le Maire de la centrale nucléaire de Penly (Seine-Maritime), le 8 décembre 2022. ELIOT BLONDET / ABACA

Soixante-dix-sept ans après la création du groupe public, et dix-sept ans et demi après l’ouverture de son capital au secteur privé, l’Etat s’apprête à reprendre 100 % d’Electricité de France (EDF). Certes, l’événement n’a rien d’une surprise, l’Etat en détenait déjà près de 84 % au lancement de son offre publique d’achat, en novembre 2022… Mais, jeudi 8 juin, date à laquelle il redevient l’unique actionnaire, une page se tourne. Au moins symboliquement.

La structure du capital évolue, la sortie de la Bourse se confirme, mais les défis demeurent. Des défis existentiels. Un endettement massif leste l’électricien national, au moment où il doit se projeter sur un programme d’investissements sans précédent. Outre des éoliennes et des panneaux solaires à raccorder au réseau, il lui faudra à la fois entretenir son parc nucléaire existant et se lancer dans la construction de six à quatorze nouveaux réacteurs – suivant les orientations du président de la République, Emmanuel Macron, en février 2022. La relance de l’atome civil trace un « horizon à très long terme qui peut difficilement être aussi celui d’actionnaires individuels », fait valoir une source bien placée du côté de l’Etat.

La reprise intégrale par les pouvoirs publics est d’abord censée rassurer les agences de notation financière et donc faciliter les conditions d’accès à des financements. Dans leur dernier relevé en date, Moody’s, Standard & Poor’s (S&P) et Fitch Ratings accordent ainsi une perspective « stable » au groupe. Sans cette réaffirmation du soutien de l’Etat, leur projection tiendrait compte d’un risque plus important, ce qui rehausserait le taux d’intérêt demandé pour des emprunts.

Fin 2022, la dette financière nette de l’entreprise était de 64,5 milliards d’euros. « Un de nos enjeux est de ne pas aller vraiment au-delà du niveau d’endettement actuel, qui est énorme », souligne un membre du conseil d’administration d’EDF. En public, le nouveau patron depuis novembre 2022, Luc Rémont, nommé en conseil des ministres, qualifie la somme de « soutenable ». Selon S&P, l’endettement économique global avoisine même 100 milliards d’euros, en intégrant des dépenses prévues pour le démantèlement de centrales nucléaires et le traitement de déchets radioactifs, ainsi que des engagements sociaux.

« Sous-rémunération chronique de son parc nucléaire »

Les gages désormais donnés aux banques et aux marchés financiers sont pourtant très loin de résoudre le casse-tête général, objectent les syndicats de salariés. « Les principaux problèmes restent entiers », notamment ceux d’une « sous-capitalisation structurelle » de la société et d’une « sous-rémunération chronique de son parc nucléaire, d’après Alexandre Grillat, secrétaire national de la CFE-CGC. Si l’Etat était cohérent, il faudrait qu’il reprenne une partie de la dette d’EDF dont il est lui-même responsable pour que l’entreprise gravisse son mur d’investissements avec un fardeau allégé ». Si le cas de figure s’est produit dernièrement à la SNCF, il n’est pas à l’ordre du jour pour l’électricien, laisse-t-on entendre au niveau de l’Etat.

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Source: Le Monde