Guerre en Ukraine, en direct : les " attaques " durant les évacuations condamnées à l’ONU
« Je suis complètement épuisé », raconte Serhi, entrepreneur ukrainien de 55 ans, confronté aux inondations à Kherson
Serhi, entrepreneur ukrainien de 55 ans, vit à Kherson. Après avoir survécu à l’occupation, le voici aujourd’hui confronté aux inondations dues à la destruction du barrage de Kakhovka. « Je suis complètement épuisé », témoigne-t-il au Monde. Par chance, l’eau s’est arrêtée à quelques mètres de sa maison, et commence à refluer lentement. Mais son entreprise, elle, est sous l’eau. « C’est un désastre. Huit ans d’effort ont été ruinés en un jour. »
A Kherson, après l’attaque du barrage de Kakhovka, survenue dans la nuit du lundi 5 au mardi 6 juin 2023. SERHIY
Son fils – dont l’identité, comme celle de son père, n’est pas dévoilée par sécurité – vit en face du Dniepr, sur la rive gauche. Son appartement a aussi échappé de justesse à la montée des eaux. Il s’était abrité chez des amis, et a pu revenir dormir chez lui hier soir. Mais sa ville, occupée, est aux trois quarts inondée, et occupée. « Là-bas, les Russes forcent les habitants à effacer les photos des inondations, explique Serhi par visio. C’est la méthode soviétique : ils effacent tout, pour faire comme si rien ne s’était passé ! » Par précaution, son fils efface toutes les photos et conversations avec son père avant de sortir dans la rue. Depuis que sa ville est occupée, le jeune homme nourrit les chiens et chats du voisinage, que les habitants ont laissés derrière eux après avoir fui. Serhi peut encore contacter son fils, mais il sait que les heures sont comptées. « Dans sa ville, il n’y a déjà plus d’électricité ni de gaz. Son téléphone ne va bientôt plus marcher », s’inquiète-t-il.
A Kherson, après l’attaque du barrage de Kakhovka, survenue dans la nuit du lundi 5 au mardi 6 juin 2023. SERHIY
Il s’interrompt soudain. « Kherson est bombardée », l’informe sa femme, que l’on aperçoit, sur l’écran, à l’autre bout de la pièce. « Zelensky vient d’arriver ici, alors les Russes bombardent », lâche calmement Serhi. Sous l’occupation, l’un de ses amis a été tué en aidant des habitants à sortir de la ville. « Ils ont tiré sur sa voiture. » Il y a dix jours, son voisin, lui, a perdu un bras dans un bombardement de la ville.
Cet Ukrainien de Kherson n’envisage pas de partir pour autant. Il se prépare à rebâtir son entreprise, et garde espoir pour la suite. « C’est dur de tout recommencer à zéro à 55 ans, mais j’ai une famille, et je veux vivre. »
Faustine Vincent
Source: Le Monde