" En guerres, Jean-Yves Le Drian témoigne ", sur France 5 : soldat ou diplomate de Hollande à Macron
Emmanuel Macron et le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, à bord du remorqueur « Abeille Bourbon », au large de Lorient (Morbihan), le 1ᵉʳ juin 2017. SÉBASTIEN SALOM-GOMIS/SIPA
FRANCE 5 – DIMANCHE 11 JUIN À 20 H 55 DOCUMENTAIRE
Pendant une décennie, la France a eu un ministre de la guerre. D’abord au portefeuille de la défense lors du quinquennat de François Hollande (2012-2017), puis aux affaires étrangères lors du premier mandat d’Emmanuel Macron (2017-2022). La guerre a été la grande affaire de Jean-Yves Le Drian, qui n’aimait rien tant que faire visiter, lorsqu’il occupait l’hôtel de Brienne, la salle des Cartes, où Georges Clemenceau (1841-1929) avait élu domicile lors de la première guerre mondiale. Soldat ou diplomate, il a recouru à l’instrument militaire plus qu’aucun autre.
Etrangement, ce mandat, inédit par sa longueur et sa nature sous la Ve République, n’a été que très peu commenté et analysé. Hélas, le documentaire diffusé par France 5 est un long plaidoyer pro domo, auquel personne ne vient apporter la contradiction.
Ce long documentaire « autorisé » s’ouvre par le récit du retrait français d’Afghanistan. Ironiquement, la séquence suivante traite de l’intervention française au Mali, en janvier 2013, qui a été un Afghanistan français. Les auteurs ne questionnent pas la réalité de l’imminence de la prise de Bamako par les djihadistes, récit fondateur de l’opération « Serval ». Un succès éclatant qui s’est vite transformé en un enlisement mortifère.
Grave échec
« La France restera avec vous le temps qu’il faudra », avait promis François Hollande, à Bamako. Elle est restée trop longtemps. En août 2014, « Barkhane » prend le relais de « Serval », et c’est le début de la fin. La France a eu les yeux plus gros que le ventre. « Nous sommes entrés dans une logique de guerre contre le terrorisme », se félicite M. Le Drian, une décennie après George W. Bush. Même logique, mêmes effets.
« Barkhane » a été un échec, sanctionné par le retrait en 2022 de la France, remplacée au Mali par les mercenaires russes du Groupe Wagner. Mais il y a plus grave : cette opération a attisé le feu qu’elle entendait éteindre et, partant, a affaibli la France en Afrique. Cela reste le plus grave échec de Jean-Yves Le Drian.
Le documentaire passe aussi en revue les regrets de M. Le Drian sur le renoncement de Barack Obama à intervenir militairement en Syrie, le 31 août 2013, après l’usage fait par Bachar Al-Assad de l’arme chimique contre son propre peuple. Il est aussi question de la guerre contre Daech et de l’opération « Sentinelle », mais c’est une histoire connue.
Les ventes de Rafale sont évoquées, mais aussi le camouflet de l’annulation du contrat de vente de sous-marins français à l’Australie. Tout cela forme un bilan assez maigre pour ce républicain fervent et pessimiste, trop confiant dans ses relations personnelles avec des dictateurs (l’Emirati Ben Zayed, l’Egyptien Sissi, le Tchadien Déby, etc.) et dans le poids politique de la France au sein d’un monde en convulsions.
En guerres, Jean-Yves Le Drian témoigne, documentaire de Patrice Duhamel et Gabriel Le Bomin (Fr., 2023, 64 min).
Source: Le Monde