Ukraine. Pas de percée, l’offensive de Kiev bute sur les champs de mines des Russes

June 15, 2023
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Faut-il douter de la compétence des tankistes ukrainiens envoyés au front pour prendre part à l’offensive dans l’oblast de Zapporijjia ? Faut-il mettre les lourdes pertes recensées en fin de semaine dernière sur l’inexpérience des équipages, certes bien équipés et bien formés mais pas aguerris ? La quinzaine de blindés ukrainiens détruits ou endommagés au sud de Zaporijjia (à 8 km au sud d’Orikhiv) pourrait en témoigner.

Mais les experts militaires et les connaisseurs de la manœuvre blindée estiment que les Ukrainiens ont appliqué les règles. Et qu’ils ont d’abord été victimes des efforts des Russes qui ont bâti une solide ligne de défense dont les champs de mines constituent un élément essentiel.

Des mines antichars et antipersonnel

Les vidéos de blindés touchés par des mines russes ne manquent pas depuis une semaine, témoignant d’une part du danger qu’elles représentent et d’autre part de la bonne résistance des chars de fabrication occidentale à ce type de charges.

Les champs de mines sont un des éléments de la défense russe , soulignait dès mai un rapport du centre de recherche britannique RUSI, et Moscou les utilise de manière extensive, mêlant mines antichars et mines antipersonnel avec de multiples mécanismes de déclenchement pour compliquer le bréchage (percée des lignes de défense, N.D.L.R.) .

Une défense qui n’est pas sophistiquée

Effectivement, les Russes ont mis à profit les six derniers mois pour fortifier 800 km de front parfois sur plusieurs échelons en profondeur, creusant des tranchées, posant des obstacles antichars et minant les axes d’attaque des Ukrainiens.

« La défense russe est organisée par couches. Ce n’est pas sophistiqué : l’adversaire doit surmonter ces obstacles l’un après l’autre », constate Alexandre Grinberg, de l’Institut pour la sécurité et la stratégie de Jérusalem (JISS). « Les Ukrainiens peuvent percer, mais pas faire s’écrouler cette masse des unités russes ».

Dans le cas de la quinzaine de véhicules touchés près d’Orikhiv, il semble qu’une opération de bréchage (pour percer des lignes de défense) a été effectuée visiblement sans appui suffisant (pas de soutien aérien et peu d’artillerie) et avec des forces ennemies retranchées et bien équipées en armes antichars. Un peloton de Bradley aurait été immobilisé par le champ de mines et les moyens envoyés pour le dégager auraient à leur tour été victimes des tirs de missiles antichars et des mines.

Des équipements pour réduire le risque

Les Occidentaux avaient à l’évidence anticipé un tel minage russe à grande ampleur dans les plaines du sud, terrains propices au déploiement des unités blindées.

Un MRAP ukrainien fourni par les USA en patrouille le 13 juin 2023. REUTERS/Oleksandr Ratushniak | REUTERS Voir en plein écran Un MRAP ukrainien fourni par les USA en patrouille le 13 juin 2023. REUTERS/Oleksandr Ratushniak | REUTERS

Les USA ont ainsi livré du Mine clearing equipment (selon la Fact Sheet on U.S. Security Assistance to Ukraine, du 13 juin 2023) et de nombreux équipements de déminage et de démolition. 500 blindés MRAP résistants aux mines ont aussi été livrés par Washington.

Pour ou contre une armée européenne ? Débattez !

Ainsi équipées pour faire face à la menace des champs de mines qui constituent la première ligne de défense des Russes, les forces ukrainiennes sont « prêtes à foncer vers une éventuelle percée », explique Pierre Razoux, directeur académique de la Fondation méditerranéenne d’études stratégiques (FMES).

Mais la percée n’a visiblement pas encore eu lieu. D’où cette multiplication d’assauts d’ampleur mineure, destinés à tester la résistance russe et à déterminer où la percée a le plus de chances de réussir.

Source: Ouest-France