A Vancouver, la communauté chinoise sous l’œil de Pékin

June 19, 2023
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Une rue du quartier chinois de Vancouver, au Canda, le 28 mai 2020. CHINA NEWS SERVICE / GETTY IMAGES

Quelques heures avant la commémoration du 34e anniversaire de l’écrasement du mouvement étudiant de la place Tiananmen, organisée le 4 juin dans un parc d’une baie de Vancouver, Kay (son prénom a été changé à sa demande), 28 ans, a reçu un coup de téléphone anonyme. « Vous feriez mieux de ne pas vous y rendre, lui a conseillé son interlocuteur, il va faire chaud, et on n’est jamais à l’abri d’incidents qui pourraient éclater… »

Originaire de Shanghaï, installée au Canada depuis quatre ans, la jeune femme, assistante administrative, n’a pas renoncé à venir. Elle s’est affublée par précaution d’une casquette et d’un masque noir qui lui mange la moitié du visage, mais précise : « Je ne me fais aucune illusion. Ils ont déjà ma photo dans leurs ordinateurs. » Elle se dit habituée à ce genre d’intimidation : « Ils ne nous interdisent rien, mais veulent nous impressionner. C’est moi qui me bats au Canada pour le respect des libertés, mais ce sont mes proches restés au pays qui risquent des représailles », se désole-t-elle.

Derrière le « ils », indéfini, utilisé par Kay, se cache la main invisible de Pékin ; les pressions que le Parti communiste chinois (PCC) de Xi Jinping exerce sur l’une de ses plus importantes diasporas établies hors Asie. Sur les 2,6 millions d’habitants du district du Grand Vancouver, un sur cinq est d’origine chinoise.

Soupçons d’intrusion chinoise lors d’élections fédérales

Située sur le Pacifique, avec les Rocheuses en arrière-plan, Vancouver ressemble à sa jumelle américaine, San Francisco (Californie). La ville a été façonnée par les multiples vagues migratoires en provenance de Chine. Les travailleurs venus construire la ligne de chemin de fer du Canadian-Pacific ont rejoint, dans les années 1880, les premiers aventuriers attirés par la ruée vers l’or.

Un siècle plus tard, les opposants à la « normalisation » chinoise de Hongkong ont succédé aux richissimes hommes d’affaires de l’ancienne colonie britannique, qui en quelques années ont fait s’envoler les prix de l’immobilier de « Hongcouver », aujourd’hui l’une des villes les plus chères au monde. C’est d’ailleurs dans l’une de ses luxueuses résidences du quartier huppé de Shaughnessy que la fille du fondateur de Huawei, Meng Wanzhou, a vécu, pendant près de trois ans, son assignation à résidence réclamée par la justice américaine. L’affaire avait provoqué une crise diplomatique sans précédent entre le Canada et la Chine.

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Les tensions entre les deux pays ont été ravivées depuis qu’en novembre 2022, des médias canadiens (Global Television Network et The Globe and Mail) ont révélé que les services de renseignement du Canada soupçonnaient le gouvernement chinois de multiples actes d’intrusion pour tenter d’exercer une influence sur les élections fédérales de 2019 et 2021.

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Source: Le Monde