Selon la Cour des comptes européenne, " l’Europe pourrait perdre la course aux batteries "
Sur le site de la nouvelle gigafactory française de batteries d’Automotive Cells Company (ACC), à Billy-Berclau (Pas-de-Calais), le 9 mai 2023. FRANCOIS LO PRESTI / AFP
La politique industrielle est un art compliqué. La Cour des comptes européenne le démontre dans un rapport d’audit consacré à la politique de l’Union en matière de batteries, rendu public lundi 19 juin, qu’elle a choisi d’intituler « Un nouvel élan stratégique est nécessaire ». Le titre est une manière positive de présenter une conclusion beaucoup plus inquiétante : « L’Union européenne risque d’échouer à devenir un moteur mondial de cette industrie », expliquent les magistrats européens.
Un problème grave, alerte Annemie Turtelboom, responsable de l’audit : « Les batteries ne doivent pas devenir le nouveau gaz naturel de l’Europe. Il faut éviter de se retrouver dans la même situation de dépendance. » Pour l’autrice de l’étude, c’est une question de souveraineté économique, mais pas seulement : sans sursaut, l’Union risque d’être contrainte de repousser au-delà de 2035 l’interdiction des véhicules thermiques. Ou de rester hyperdépendante à la Chine qui en produit 76 %.
Pourtant, au départ, tout semblait être sur de bons rails. Dès 2008, le risque de dépendance est identifié. En 2017, une alliance européenne des batteries est envisagée. En 2018, un plan d’action est défini. Depuis, la Commission le déroule et les projets fleurissent dans toute l’Europe. A lire les annonces, on pourrait même y produire trop de batteries.
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« D’ici à 2030, si les entreprises mettent en œuvre les projets annoncés avec succès, l’Union pourrait atteindre une capacité de production de batteries comprise entre 714 et 1 200 GWh », indique le rapport : de quoi satisfaire la demande dès 2025 et d’équiper jusqu’à 16 millions de véhicules par an en 2030, « soit plus que le nombre de nouvelles immatriculations de voitures particulières et de camionnettes enregistré pendant le pic pré-Covid » et même « deux fois plus que l’objectif de production que s’est fixé la Commission ». Mais tout réside dans le « si ». Car les magistrats semblent très dubitatifs sur la réalisation des projets annoncés et mettent le doigt sur une série d’obstacles majeurs.
Lenteur d’adaptation européenne
Le premier − la complexité des aides européennes, le manque de lisibilité et les délais trop longs pour les obtenir − semble presque le plus simple à résoudre au vu de la difficulté des suivants. Le deuxième, c’est la vitesse à laquelle le contexte international évolue et la lenteur avec laquelle l’Europe s’adapte : tout le plan d’action pour les batteries a été conçu à un moment où l’énergie était abordable et n’a pas pris en compte le risque posé par une éventuelle hausse.
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Source: Le Monde