" Nous poursuivons la mobilisation pour la libération d’Azat Miftakhov et contre les atrocités commises par les autorités russes "
Lorsque le doctorant en mathématiques de l’université d’Etat de Moscou et militant anarchiste Azat Miftakhov a été arrêté en février 2019, la Russie n’était pas encore le pays paria qu’il est devenu depuis l’invasion de l’Ukraine. Au contraire, la ville de Saint-Pétersbourg venait d’être choisie pour accueillir le Congrès international des mathématiciens (CIM) en juillet 2022. Cela n’a pas incité le FSB, le service de renseignement russe héritier du KGB, à la moindre retenue : arrestation musclée d’Azat Miftakhov, filmée et diffusée par la télévision publique Rossia 24, torture, simulacre de procès sur de fausses accusations d’« hooliganisme », peine énorme de six ans de prison et exploitation homophobe de la bisexualité d’Azat Miftakhov ; ce dernier sévice a été révélé récemment par son épouse.
Lors de son arrestation, Azat Miftakhov a été accusé de « fabrication d’explosifs ». Il a été torturé au poste de police mais, au bout de trois jours, le tribunal a rejeté l’affaire faute de preuves. Il a été relâché, puis arrêté de nouveau ; cette fois, il a été accusé d’avoir participé à un complot plus d’un an plus tôt pour briser une fenêtre dans un bureau du parti Russie unie du président Vladimir Poutine. Il a plaidé non coupable.
Mais, le 18 janvier 2021, un tribunal de Moscou a prononcé une peine de six ans d’emprisonnement dans une colonie pénitentiaire, sur la base du témoignage de deux témoins secrets – dont l’un a affirmé l’avoir identifié, alors qu’il était prétendument masqué, par ses « sourcils expressifs » et est décédé plusieurs mois avant le procès. L’organisation russe de défense des droits de l’homme Memorial a reconnu Azat Miftakhov comme prisonnier politique dès 2019. Human Rights Watch a qualifié le verdict d’injuste et d’abusif, et a appelé les autorités à l’annuler.
La caste des « offensés »
Azat Miftakhov purge actuellement sa peine à la colonie pénitentiaire numéro 17, à Omoutninsk, dans la province de Kirov. Il est affecté à des travaux physiques pénibles dans un atelier de menuiserie. Il devrait être libéré le 23 septembre. Cependant, selon plusieurs reportages, le FSB serait en train de fabriquer une nouvelle affaire pénale contre lui, en envisageant de l’accuser d’être membre du groupe antigouvernemental « Réseau ». Le FSB a obtenu un faux témoignage forcé d’Igor Chichkine, un prisonnier qu’il interrogeait dans la colonie pénitentiaire à Valdaï. Igor Chichkine a été exfiltré de Russie et s’est réfugié en France. Il a raconté à Mediapart comment il a fini par accepter sous la torture de compromettre Azat Miftakhov en chargeant son dossier de crimes imaginaires. S’il est reconnu coupable de ces fausses accusations, Azat Miftakhov risque une peine de prison supplémentaire beaucoup plus longue.
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Source: Le Monde