Pour ASML la chaine d’approvisionnement des semi-conducteurs ne peut être que mondiale

June 23, 2023
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Le mot « souveraineté » s’est imposé comme une musique de fond dans les discours politiques de Paris à Bruxelles, pour être souverain il faut une part d’autonomie dans les ...

Le mot « souveraineté » s’est imposé comme une musique de fond dans les discours politiques de Paris à Bruxelles, pour être souverain il faut une part d’autonomie dans les industries stratégiques. Les semi-conducteurs sont pleinement concernés, l’afflux de Chips Act à travers la planète, ces programmes de subventions pour développer la production locale, l’illustre. Si l’industrie les observe d’un œil favorable, elle prévient : l’indépendance est impossible, la coopération indispensable.

ASML, une entreprise internationale aux racines européennes

« Nous ne croyons pas, à ASML, que le découplage soit possible. Nous pensons que ce sera extrêmement difficile et extrêmement coûteux », voilà le message de l’interview accordé par Christophe Fouquet, vice-président exécutif et directeur commercial d’ASML, à Nikkei Asia.

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ASML, basé à Veldhoven, dans la banlieue d’Eindhoven, est l’unique fournisseur mondial des machines de lithographie aux ultraviolets extrême (EUV), utilisé pour fabriquer les puces les plus avancées du monde. C’est également la première entreprise technologique du continent, avec une valorisation de 288 milliards de dollars.

ASML est très dépendant de l’étranger à différents niveaux. Côté vente, en 2022, 87 % de ses machines ont été expédiées en Asie, notamment à Taïwan moins de 3 % vers la région Europe, Moyen-Orient, Afrique. Côté production, 80 à 90 % sont aux Pays-Bas, mais les EUV ne peuvent être fabriqués sans des pièces venant du Royaume-Uni, de l’Allemagne, du Japon, des États-Unis… À l’occasion de la présentation des résultats 2022 de l’entreprise, son PDG, Peter Wimmink, disait déjà « Nous ne pouvons pas survivre sans notre écosystème de partenariat ».

L’écosystème semi-conducteur est très éclaté à travers la planète, aucun pays ne peut se vanter de maîtriser 100 % la chaîne de valeur. Il s’agit d’une industrie où la moindre usine peut coûter plus d’une dizaine de milliards d’euros. Les EUV elles-mêmes dépassent les 100 millions pièces. Comme l’explique Christophe Fouquet, le pays qui ambitionne l’autonomie totale doit avoir les poches profondes. La direction générale des entreprises, dépendant de Bercy et chapeautant France 2030, avait assuré à Siècle Digital qu’une autonomie complète n’était ni l’objectif des politiques de soutien, ni souhaitable.

Avec les semi-conducteurs, la géopolitique n’est jamais loin

L’argent, qui plus est, ne fait pas tout, il faut aussi les connaissances. Il s’agit d’une industrie très avancée, la plus dépensière en recherche et développement. 14 200 des 39 000 employés d’ASML se consacrent à la R&D. L’entreprise a investi 3,3 milliards d’euros en 2022. En mentionnant le dernier bijou de l’entreprise, la machine lithographique à haute ouverture numérique extrême ultraviolet (EUV High-NA), Christophe Fouquet a soufflé « c’est extrêmement difficile à copier ».

Si le vice-président exécutif d’ASML prend la peine de répéter un message partagé au sein de l’écosystème, à un média asiatique de référence, cela traduit possiblement une inquiétude d’ASML. L’entreprise est victime des sanctions américaines contre la Chine. Washington a fait pression sur les Pays-Bas pour qu’ASML ne puisse pas vendre son matériel avancé dans l’Empire du Milieu. Le fabricant a assuré lors de ses résultats que cela n’allait pas l’impacter, mais il n’a peut-être pas envie que la rivalité technologique des deux géants aille un cran au-dessus.

Source: Siècle Digital