Intelligence artificielle : les photographes réclament des garde-fous

July 02, 2023
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Aux Rencontres photographiques d’Arles, plusieurs expositions montreront des images générées par le logiciel d’intelligence artificielle Midjourney. LIONEL BONAVENTURE / AFP

La photographie générée par les algorithmes d’intelligence artificielle (IA) avec sa cohorte d’hybridation et de recombinaison de millions de pixels issus d’images sources constituera-t-elle un outil d’aide à la création inscrit dans un futur pacte virtuel ? Ou au contraire s’annonce-t-elle comme la porte ouverte aux pires plagiats et à des pratiques de concurrence déloyale développées à très grande échelle ? La question prend une acuité particulière à l’ouverture des 54es Rencontres d’Arles (Bouches-du-Rhône), qui se tiendront du 3 juillet au 24 septembre.

Cette année, dans la galaxie des expositions arlésiennes, la réalisatrice malaisienne Tan Chui Mui est la seule artiste à utiliser cette technologie, après Joan Fontcuberta et Pilar Rosado, en 2022. Présentées à l’abbaye de Montmajour, deux séries de clichés – dont l’un est titré Deux hommes mesurent le terrain sur l’île de Kinmen – sont générées par le programme d’intelligence artificielle Midjourney. Ils posent, selon Tan Chui Mui, « la question du sens de la photographie, de sa paternité et de sa propriété », sans vouloir, dit-elle, y apporter de réponse définitive.

La confusion est telle entre une image réelle et celle issue d’une IA que deux prix de photographies, le Colorado State Fair Fine Arts Competition attribué, en 2022, à Jason Allen pour son Théâtre d’opéra spatial, puis le World Photography Award, qui a récompensé Boris Eldagsen en mars pour un double portrait de femmes, avaient été générés par IA. Ce que les jurys ignoraient. Cette méprise a prouvé que sur la base de phrases décrivant le résultat attendu (les fameux « prompts »), il est possible d’obtenir grâce à une gigantesque banque d’images une photographie d’un rendu saisissant qui trompe aisément un œil humain censé être exercé…

« Pas de réponse en droit français »

Aujourd’hui, les règles applicables aux créations générées par les programmes d’intelligence artificielle – aussi bien Midjourney que Dall-E, Stable Diffusion, NightCafe ou Snowpixel restent encore très floues. A la question simple de savoir qui est l’auteur d’une photographie générée par une IA, Marc Schuler, associé de Taylor Wessing, spécialisé en propriété intellectuelle, répond qu’« il n’y a pas encore de réponse en droit français ». « L’intervention d’un humain, d’une personne physique, constitue le principe fondateur du droit de la propriété intellectuelle », ajoute-t-il.

Et toute œuvre doit être empreinte de la personnalité de son auteur. Si bien que, en cas d’utilisation d’une IA, les droits d’auteur seront reconnus « selon le degré d’intervention de l’artiste sur l’œuvre concernée », ajoute cet avocat. Mais si l’artiste se borne à faire des requêtes à la machine, il peut faire une croix sur ses droits d’auteur.

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Source: Le Monde