L'Italie étouffe sous le tourisme de masse
Par Olivier Tosseri
Publié le 30 avr. 2023 à 12:15
« L'Italie asphyxiée par le tourisme ». Le quotidien « La Stampa » n'hésite pas à critiquer les effets du tourisme alors qu'approche la saison estivale. La fin de la pandémie de Covid-19 a redonné de l'air à un secteur pénalisé par les mesures de confinement. Trop, selon les observateurs. Ils sont nombreux à déplorer que les centres-villes des cités de la péninsule étouffent littéralement sous les hordes de touristes, qui ont fait leur retour en masse. C'est le cas du correspondant du « Guardian » en Italie, dont l'analyse a trouvé un large écho dans les colonnes de « La Stampa ».
Tobias Jones y déplore les dérives du « surtourisme », qui a complètement bouleversé notre rapport au voyage : « Autrefois, nous voyagions dans l'inconfort et les difficultés pour nous ouvrir l'esprit, découvrir d'autres cultures et constater l'immensité du monde », estime-t-il. « Aujourd'hui, les voyages comportent un minimum de risques mais nos ego démesurés encombrent les lieux », réduits à servir de décor à selfies. Le « Grand Tour » italien des artistocrates britanniques, des poètes allemands ou des peintres français au XVIIIe siècle est un lointain souvenir…
Une campagne de promotion polémique
Une critique qui intervient en pleine polémique sur la nouvelle campagne de promotion de l'Agence nationale italienne du tourisme (Enit). La Vénus de Sandro Botticelli y est représentée en influenceuse multipliant les selfies devant les monuments les plus emblématiques de la Péninsule. « Follow me », lance-t-elle aux visiteurs, avec le slogan « Open to meraviglia » (merveilles, en français). Une campagne qui n'a pas été seulement critiquée pour sa banalité et l'utilisation incongrue de la langue anglaise, mais aussi pour son coût exorbitant de 9 millions d'euros.
Si le tourisme est une aubaine économique et assure 13 % du PIB italien, il peut aussi être une calamité pour les lieux fragiles qui voient affluer massivement des visiteurs souvent irrespectueux. C'est le cas du village de Portofino en Ligurie, qui ne compte que 400 habitants.
Amendes pour les piétons
Pendant le dernier week-end de Pâques 7.000 touristes se sont précipités dans ce petit port, provoquant de véritables « embouteillages de piétons » dans son centre-ville. Le maire a donc adopté une ordonnance instituant des zones rouges touristiques. Elle interdit aux visiteurs de « s'arrêter de marcher » lors de leur déambulation touristique, sous peine d'une amende de 275 euros.
D'autres communes très fréquentées ont également imposé des amendes pour limiter les nuisances : interdiction de manger dans certaines rues fréquentées de Venise et Florence, de s'asseoir sur les marches de la place d'Espagne à Rome… Les édiles de nombreuses villes d'art demandent désormais au gouvernement l'adoption d'une loi spéciale pour mieux encadrer le tourisme de masse.
Source: Les Échos