Rétrogradation de Sochaux en National 1 - Comment le vénérable FCSM a-t-il pu en arriver là ?

July 04, 2023
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"L’objectif est la montée. Cela fait quatre ans qu’on est arrivés, quatre ans qu’on a remis le club en place, que ce soit au niveau financier, sportif, etc… Si on commence à préparer un budget L1 à ce moment-là de la saison ? Bien sûr. On anticipe tout ça en devenant totalement schizophrène, en faisant deux scénarios. Il y a un scénario Ligue 2, et on anticipe déjà une nouvelle équipe." En mars dernier, au micro de BeIn Sport, Samuel Laurent, directeur général de Sochaux, plastronnait. Mais il avait oublié de plancher sur un troisième scénario, celui d'une rétrogradation administrative.

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Aujourd'hui, le très vénérable Football Club Sochaux-Montbéliard est tout près d'être rayé de la carte. La semaine dernière, la DNCG a ordonné sa relégation administrative en National 1. Les Lionceaux ont fait appel mais si le gendarme financier du football français confirme sa décision, c'est le dépôt de bilan qui guette Sochaux, au train de vie impossible en N1 et contraint, dès lors, de repartir de zéro. Comment le club, qui jouait encore la montée en Ligue 1 au début du printemps, a-t-il pu en arriver là ?

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Les yeux plus gros que le ventre

La descente aux enfers de Sochaux, c'est l'histoire d'un club qui s'est vu trop beau. En 2019, il est, déjà, à l'agonie. Le groupe chinois Nenking le rachète, assaini la situation en maintenant le club en L2. En mai 2022, Sochaux échoue en barrages aux tirs au but face à Auxerre et voit la L1 lui filer entre les doigts. Ragaillardi par la chimère d'une accession dans l'élite, l'actionnaire se donne les moyens de monter et change de dimension économique. Sauf que la réalité, elle, ne bouge pas d'un pouce et le FCSM reste en L2.

Le FC Sochaux-Montbéliard de Doumbia est au bord du précipice Crédit: Getty Images

Ibrahim Sissoko débarque à l'été 2022 avec un salaire de 80 000 euros mensuels (assorti d'une prime de 400 000 euros !) qui explose les grilles du club. Moussa Doumbia et sa grosse expérience en L1 débarquent de Reims et Sochaux lui déroule le tapis rouge. Les cadres du vestiaire ont vent de la nouvelle politique salariale et certains en profitent pour négocier à la hausse. La masse salariale quadruple en trois ans alors que la L1 continue de se dérober. "Les dirigeants ont fait un all-in sur cette saison, analyse Rémi Farge, journaliste à l'Est Républicain et suiveur des Lionceaux. On a cette impression dès le début de saison et le club s'est brûlé les ailes."

Au centre des interrogations : l’atypique Samuel Laurent

Au centre des interrogations aujourd'hui, la gestion de l'atypique Samuel Laurent, seul maître à bord après avoir fait le ménage autour de lui et seul interlocuteur auprès de l'actionnaire. DG du club depuis 2019 grâce à son amitié avec le fondateur du groupe Nenking, il débarque alors dans un milieu qu'il ne connaît pas malgré ses liens de parenté avec Lucien Laurent, premier buteur en Coupe du monde, dont il est le petit neveu.

Il n'est ni un financier ni un administratif, des profils qu'on retrouve habituellement à la tête des clubs professionnels. Politologue, spécialiste d'Al Qaïda, essayiste spécialisé dans l'islamisme et auteur de quelques livres aux conclusions controversées sur le sujet : il n'a, a priori, pas le CV pour diriger un club de Ligue 2 et se vante même de sa méconnaissance. Et pourtant… Il est parachuté à la tête d'une institution du foot français dans une logique d'expansion économique internationale et refuse de s'entourer d'hommes capables de le guider dans son nouvel environnement.

Skelly Alvero, le milieu de Sochaux, est proche de s'engager à l'OL. Crédit: Imago

Depuis août dernier, Laurent assure que l'actionnaire est solide, qu'il remettra la main au pot si Sochaux ne remonte pas. En janvier, il promet que le club est en parfaite santé financière. Un centre d'entrainement flambant neuf à 20 millions d'euros est prêt à sortir de terre dans le Territoire de Belfort. "Le centre de performance et son centre de formation sont deux éléments extrêmement importants pour nous, afin de nous aider à monter en Ligue 1 et à y rester sur le long terme", témoigne alors Frankie Yau, le président qui a fait exceptionnellement le déplacement en ce 30 janvier.

Grande braderie et grosse angoisse

Le premier versement est pour juillet, il n'aura jamais lieu. Sochaux a eu les yeux plus gros que le ventre. Cinq mois plus tard, c'est grosse opération déstockage. Les gros salaires sont libérés (Sissoko) ou prêtés (Weissbeck). Skelly Alvero est vendu à Lyon pour 6 millions d'euros, bonus compris. Suffisant pour boucher les trous ? L'actionnaire chinois devra au moins lâcher 15 millions d'euros pour maintenir le club en Ligue 2. En a-t-il l'intention ? C'est aujourd'hui un grand mystère. Nenking est aujourd'hui fragilisé par la crise de l'immobilier en Chine.

Le FCSM est au bord du gouffre. "Sochaux est goutte d'eau dans leur business, continue Rémi Farge. Il n'y a aucun rapport affectif comme avec Peugeot. S'il fallait boucher les trous, Peugeot n'avait pas le choix. C'est l'image de la marque qui était en jeu. Aujourd’hui…" Longtemps détenteurs du record de saisons en Ligue 1, les doubles champions de France n'ont plus que leur passé auquel se raccrocher.

Leur futur, lui, est bien angoissant. "C'est le club qui a inventé le professionnalisme, le premier centre de formation de France, rembobine Fabrice Lefevre, président du groupe de supporters Planete Sochaux. C'est un gâchis absolu. On ressent beaucoup de colère. Comment peut-on mettre en danger une telle institution ? On est chez les fous." Sochaux sera fixé en début de semaine prochaine. En attendant, il retient son souffle.

La DNCG relègue le FC Sochaux en National Crédit: Getty Images

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Source: Eurosport FR