Le testament de Silvio Berlusconi rappelle son inextricable relation avec la Mafia
Les deux hommes se rencontrent il y a une soixantaine d’années à Milan, lorsqu’ils sont encore étudiants universitaires. Leur rapport était indissoluble, racontent aujourd’hui leurs proches. Une place serait même réservée pour Marcello Dell’Utri au sein du mausolée où repose désormais Silvio Berlusconi, assure la presse italienne. Après une parenthèse dans sa Sicile natale, le Palermitain revient à Milan dans les années 1970 pour travailler auprès du futur homme fort de la Péninsule. Il lui présente un ami, Vittorio Mangano, que Silvio Berlusconi recrute dans sa résidence privée comme palefrenier. Or, plus tard, des sentences judiciaires révèlent que l’individu est en réalité un mafieux notoire engagé pour protéger l’entrepreneur milanais et ses proches du crime organisé.
Lien dès les années 1960?
Durant ces années, les riches hommes d’affaires du nord craignent que les membres de leur famille ne soient enlevés pour être échangés contre une rançon. Silvio Berlusconi aurait donc rencontré le parrain des parrains de Cosa Nostra pour s’assurer que ses proches soient épargnés. L’entrevue est attestée par un témoin de justice. L’intermédiaire serait Marcello Dell’Utri. Le futur magnat des médias et président du Conseil aurait donc payé d’importantes sommes d’argent pour s’assurer la protection de la Mafia; 50 millions de lires tous les ans, écrit La Repubblica, ajoutant, ironique: «Il était si préoccupé par les enlèvements qu’il n’a pas pensé à s’adresser aux forces de l’ordre mais à son ami Marcello Dell’Utri, qui a fait entrer chez lui le plus important des parrains palermitains.»
Le rapport de Silvio Berlusconi avec la Mafia serait en réalité antérieur. Son activité entrepreneuriale aurait été lancée, dans les années 1960, grâce à l’investissement de la banque Rasini, jugée par la magistrature proche du crime organisé sicilien. Or, aucune sentence judiciaire n’a jamais prouvé cette relation directe entre Silvio Berlusconi et la Pieuvre. Mais son nom apparaît dans de nombreuses enquêtes antimafia, dont certaines sont encore ouvertes, et les enquêteurs sont convaincus qu’il a entretenu ses relations mafieuses jusqu’à la veille de son entrée en politique, en 1994.
Une photographie pour preuve?
La relation entre la Mafia et son ami Marcello Dell’Utri a cependant été juridiquement établie. Après un quart de siècle de procès, l’ami de l’homme d’Etat est définitivement condamné en 2014 à sept ans de prison pour concours externe en association mafieuse. L’entrepreneur palermitain a toujours nié de savoir que le palefrenier de Silvio Berlusconi faisait partie de la plus puissante des mafias italiennes et les audiences et interrogatoires ne l’ont jamais fait sortir de son silence. L’agence Ansa rappelle que Silvio Berlusconi a payé la défense de son ami et lui a versé une rente mensuelle de 30 000 euros.
Il existe un homme assurant d’avoir les preuves de cette relation inavouable entre le Caïman et la Pieuvre. Le repenti sicilien Salvatore Baiardo s’est imposé sous le feu des projecteurs médiatiques ces derniers mois pour avoir d’abord prédit l’arrestation du parrain des parrains Matteo Messina Denaro, en janvier dernier, puis en assurant ce printemps détenir une photographie de Silvio Berlusconi aux côtés d’un notoire boss mafieux et d’un général des carabiniers. Cette image existe-t-elle ou est-elle le fruit de l’imagination d’un homme en manque d’attention? La mort de l’ancien premier ministre, ayant toujours refusé de témoigner devant la justice, rend la recherche de la vérité encore plus difficile.
Source: Le Temps