" Face à la tempête chinoise, Renault choisit d’attirer pour neutraliser "
Luca de Meo, directeur général de Renault, au salon VivaTech à Paris, le 14 juin 2023. THIBAULT CAMUS / AP
Qui a dit que les Français n’étaient pas ouverts sur le monde ? Depuis Louis XIV, la France nourrit une véritable fascination pour l’Extrême-Orient. Le monde des affaires y occupe l’avant-poste. Citroën, héros de la Croisière jaune en 1931, fut l’un des premiers constructeurs occidentaux à vendre des voitures dans la Chine maoïste, en 1984. Trente ans plus tard, son partenaire Dongfeng est entré au capital de la maison mère PSA.
Mais la fascination se mêle vite de crainte. Jeudi 6 juillet 2023, Carlos Tavares, le patron de Stellantis, a fustigé les politiques européennes coupables, à ses yeux, de « dérouler le tapis rouge » aux constructeurs chinois avec leur politique du tout-électrique. Et Jean-Dominique Senard, le président de Renault, a brandi, sur la scène des Rencontres économiques d’Aix-en-Provence, samedi 8 juillet, la menace d’un « orage chinois » dans le ciel du Vieux Continent. Les deux patrons évoquent la domination grandissante de l’empire du Milieu sur toute la filière électrique, de la mine à la voiture.
Chaque acteur réagit à sa manière. Face à la tempête qui arrive, Renault choisit la méthode du paratonnerre : attirer pour neutraliser. Le constructeur a ainsi officialisé, mardi 11 juillet, la signature d’un accord avec Geely, l’industriel chinois le plus présent en Europe depuis son rachat de Volvo, en 2010. Ils ont tous les deux porté sur les fonts baptismaux une nouvelle société commune, à 50-50, qui ambitionne de devenir le leader mondial des moteurs thermiques.
Augmentation des ventes
Au total, dix-sept usines dans le monde sont versées dans la corbeille des mariés. Une manière pour Renault de séparer plus nettement son métier d’aujourd’hui, les voitures à essence, de celui de demain, les électriques. Cette société de l’ancien monde devrait d’ailleurs accueillir à son capital le pétrolier saoudien Aramco. Le calcul est que le monde aura encore longtemps besoin de moteurs thermiques et hybrides, même si l’Europe n’en veut plus.
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C’est aussi, bien sûr, le moyen de purifier le reste du groupe avec la création de la société Ampere, focalisée sur l’électrique et introduite en Bourse probablement en 2024. Celle-là sans les Chinois, mais avec le tumultueux partenaire japonais Nissan. Brique par brique, la stratégie offensive de Luca de Meo, le directeur général de Renault, se met en place, foisonnante et imaginative, faite d’innovation organisationnelle et de multiplication des sorties de produits. Elle semble porter ses fruits, puisque sur le premier semestre le groupe a augmenté ses ventes de plus de 20 % en Europe. Les deux paratonnerres de Renault ne simplifient pas le paysage, sont porteurs de grands risques, mais au moins ils annoncent la météo, orageuse.
Source: Le Monde