Fonds immobiliers, SCPI, OPCI : l’AMF appelle à la vigilance
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Dans1 sa cartographie des marchés et des risques 2023, publiée le 7 juillet, l'AMF (autorité des marchés financiers) appelle à la vigilance sur les fonds immobiliers investis dans le secteur commercial.
Les fonds immobiliers occupent une place de plus en plus importante dans le paysage immobilier européen. Selon le rapport de l'AMF, entre fin décembre 2008 et fin mars 2023, les encours domiciliés en zone euro ont augmenté de 320 %, passant de 303 à environ 1 270 milliards d'euros. L'immobilier commercial représente une part importante des portefeuilles. Dans les fonds immobiliers français, il représente environ 70 % de l'actif sous gestion.
La part de l'immobilier commercial de la zone euro détenue par les fonds immobiliers de la zone euro s'est considérablement accrue, passant de 20 % en 2013 à 40 % en 2022. En France, environ 20 % de l'immobilier physique commercial est détenu par les fonds immobiliers français.
À fin 2022, la France est le troisième pays de domiciliation des fonds immobiliers en termes d'actif net, derrière l'Allemagne et le Luxembourg. Les SCPI et les OPPCI représentent une majorité des encours, avec environ 63 % du total.
Les tendances du marché immobilier
Avec la crise sanitaire, le volume des transactions portant sur l'immobilier commercial en Europe s'est fortement contracté tandis que les prix en zone euro ont baissé. Les valorisations des sociétés d'investissement immobilières cotées en Europe ont connu une dépréciation d'environ 10 % entre fin 2021 et mi-2022 et l'indice des prix des bureaux en Île-de-France a enregistré une baisse d'environ 2 % au T1 2023.
Par ailleurs, les conditions de financement et donc les valorisations de l'immobilier commercial pourraient être affectées par la forte remontée des taux d'intérêt. Une part croissante d'investisseurs estime que les conditions de financement se sont dégradées et que le marché est entré dans une phase de ralentissement. Les prix sont également perçus comme élevés, ce qui laisse de la place à une éventuelle correction de marché.
Dans ce contexte, l'AMF appelle à la vigilance sur ces fonds immobiliers « qui font face à un certain nombre de vulnérabilités que le ralentissement, voire le retournement du marché pourraient cristalliser ».
Le risque de liquidité
Les fonds immobiliers investissent par définition dans des actifs immobiliers, peu liquides par nature. Certains fonds offrent à leurs investisseurs la possibilité de racheter leurs parts à des fréquences variables (bimensuelle ou hebdomadaire pour la plupart des fonds ouverts, qui sont toutefois minoritaires au sein des encours des fonds immobiliers français). Après plusieurs années de rendements très élevés et de collecte dynamique, une baisse de performance, conséquence d'une contraction du marché immobilier, pourrait inciter les investisseurs à se retirer et provoquer des cessions forcées d'actifs renforçant alors la baisse des prix.
Au contraire, les fonds fermés ne permettent pas aux investisseurs de demander le rachat de leurs parts avant l'échéance : les rachats restent possibles à condition qu'ils soient compensés par des souscriptions dans un marché secondaire organisé par le gérant. Ce type de fonds présente donc un profil de liquidité qui tient compte du caractère intrinsèquement moins liquide des biens immobiliers.
Le risque de liquidité est donc moins présent dans le cas français si l'on considère que les SCPI et les OPPCI sont des fonds fermés en pratique.
Le risque lié à l'effet de levier
Certains fonds présentent des niveaux élevés de levier financier (constitué par le biais de dettes et d'emprunts). La forte remontée des taux augmente la charge des intérêts (soit directement en cas de prêts à taux variables, soit à maturité lorsqu'il faudra refinancer la dette), ce qui pèse sur la performance des fonds. L'AMF souligne que le levier des fonds immobiliers français est limité. Les fonds dépassant la limite de 250 % de levier récemment imposée par la règlementation sont très marginaux.
Le risque de rachat préventif
Les fonds immobiliers pourraient aussi faire face à des rachats préventifs : la valorisation des actifs immobiliers est réalisée beaucoup moins fréquemment que pour les investissements plus liquides, comme les actions ou les obligations. Si les investisseurs anticipent une baisse des prix, ils sont incités à demander le rachat au plus tôt afin de bénéficier d'une valeur liquidative qui n'intègre pas encore la correction. Des outils de gestion de liquidité comme les frais de sortie ou encore les mécanismes de plafonnement des rachats permettent de limiter le risque. Toutefois, si leur mise en place encouragée par l'AMF, leur adoption reste encore insuffisante.
Source: Boursorama