Rétrogradation - "Le club sentait trop l’huile de vidange" : Pourquoi Peugeot a lâché Sochaux (et ne reviendra pas)

July 12, 2023
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Personne ne sait aujourd'hui où la chute du FC Sochaux-Montbéliard s'arrêtera. En National 1 ? Beaucoup plus loin en cas de dépôt de bilan ? Mais tout le monde a cerné, en revanche, le début de la dégringolade et des problèmes : 6 juillet 2015. Ce jour-là, Peugeot officialise la vente du club aux Chinois de Ledus. C'est la fin d'une histoire de 87 ans. En 1928, Louis Maillard-Salin et Maurice Bailly, deux salariés de Peugeot, créent le club avec le soutien du directeur de l’usine, Jean-Pierre Peugeot. Le FCSM deviendra le premier club professionnel français et développera le premier centre de formation de l'Hexagone.

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Sochaux, c'est Peugeot et Peugeot, c'est Sochaux. Le stade est imbriqué au beau milieu des usines de la marque. "A mon époque, il y avait quatre joueurs du cru dont les parents bossaient à l'usine : Pierre-Alain Frau, Camel Meriem, Jérémy Mathieu et Benoît Pedretti, expose Jean-Claude Plessis, président du FCSM de 1999 à 2008. Il y avait un vrai lien entre Peugeot et l'équipe de foot qui suscitaient un engouement." En France, il n'existe aucun équivalent, aucun modèle aussi poussé. Aucune entreprise locale, même Casino à Saint-Etienne ou Nicollin à Montpellier, n'a autant contribué à la structuration et au rayonnement d'un club de foot français.

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L'effectif 2012/2013 du FC Sochaux pose dans les usines de PSA à Montbéliard Crédit: Getty Images

Ce n'est pas dans la mission du groupe PSA de gérer des clubs de football

A l'étranger, en revanche, les exemples sont nombreux : Fiat avec la Juventus, Volkswagen avec Wolfsburg, Philips avec le PSV Eindhoven ou Bayer à Leverkusen. "A Montbéliard, il y avait la famille Peugeot qu'on pouvait voir dans les rues, continue Plessis. Moi, c'est Eric qui m'a fait venir, c'était le club de son grand-père. La famille était hyper attachée au club." Sauf que les dirigeants de PSA n'ont pas la même fibre alors, en 2014, quand Thierry Peugeot est éjecté du conseil de surveillance du groupe, la vente du club n'est plus taboue.

La situation économique du groupe est difficile, Carlos Tavares, le grand patron, veut se concentrer sur l'activité automobile. C'est en tout cas le message officiel. "Ce n'est pas dans la mission du groupe PSA de gérer des clubs de football, nous n'aurions pu faire qu'un très mauvais travail à sa tête", confesse-t-il dans une audition à l'Assemblée en 2020. "Cette vente servait d'abord de message aux salariés de l'usine à Sochaux : 'vous n'êtes plus les enfants chéris de la marque', nous explique Jean-Baptiste Forray, journaliste et auteur du livre Au cœur du grand déclassement, la fierté perdue de Peugeot-Sochaux (Les Éditions du Cerf, 2022). Le message a été reçu 5 sur 5 puisqu'à l'usine, la productivité a augmenté."

Un jeune garçon brandit un drapeau de Sochaux dans le stribunes de Bonal Crédit: Imago

Image de marque vs trahison

Un soir de 2019, Isabel Salas Mendez, directrice du sponsoring et des partenariats de Peugeot, livre une autre version du désengagement au micro d’Europe 1 : "Le football, c’est un sport qui ne va pas trop avec nos valeurs. Il véhicule des valeurs populaires, alors que nous, on essaie de monter en gamme." Il s'agirait donc d'une histoire d'image pour une marque qui continue, par exemple, de s'afficher à Roland-Garros et sur les maillots du Stade Toulousain. "Le club sentait trop l'huile de vidange et la gitane", synthétise Jean-Baptiste Forray. Du côté des supporters sochaliens, on le vit, encore aujourd'hui, comme une terrible trahison.

"Aujourd'hui, j'en veux énormément à Peugeot et à Carlos Tavares, note Fabien Lefevre, président du groupe de supporters Planète Sochaux. Une semaine après s'être payés une page entière dans L'Equipe où on pouvait lire : "1 Renard (ndlr : pour Hervé Renard alors entraineur) et 11 Lionceaux s'en vont combattre - Peugeot support de Sochaux depuis 1928", ils ont bazardé le club et leur responsabilité est écrasante dans ce qu'on vit aujourd'hui. Ils ont commis un infanticide quand on sait les liens qui unissait Sochaux et Peugeot."

En 2015, Peugeot vend Sochaux au groupe Ledus Crédit: Getty Images

Peugeot s'est débarrassé du club, c'est vrai

Peugeot s'est débarrassé du club, c'est vrai, constate aujourd'hui Plessis, ancien salarié de la marque comme tous les présidents du FCSM jusqu'à la vente. Oscar Tavares est arrivé et il n'en avait rien à faire. Il n'avait ni famille, ni racine." Ledus récupère le bébé. "Ce qui est troublant, c'est qu'il est vendu à un investisseur très peu sérieux, une entreprise survalorisée en bourse au regard de sa réalité économique", explique Jean-Baptiste Forray. Selon l'Est Républicain, Sochaux a été vendu au groupe chinois Ledus pour… 50 000 euros , l’équivalent grosso modo d'une 508. ", constate aujourd'hui Plessis, ancien salarié de la marque comme tous les présidents du FCSM jusqu'à la vente.Ledus récupère le bébé.", explique Jean-Baptiste Forray.

En avril 2019, après 4 ans de gestion hasardeuse, alors que Sochaux joue le maintien en L2 et fête ses 90 ans d'existence, le président du club et de Ledus Wing Sang Li, est déclaré en faillite personnelle par la Haute-Cour de justice de Hong-Kong. Sollicité alors que l'avenir du FC Sochaux-Montbéliard était encore flou, le président de PSA Carlos Tavares fait savoir qu'il ne viendrait pas au chevet du club. Le cordon est coupé, pas question de faire machine arrière. Pas plus aujourd'hui, en 2023, alors que toute la région craint un dépôt de bilan. Sochaux, ce n'est plus Peugeot. Et Peugeot, ce n'est plus Sochaux.

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Source: Eurosport FR