HelloAsso, le pari réussi de cette entreprise solidaire installée à Bordeaux

May 01, 2023
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Installée depuis dix ans dans la métropole bordelaise, cette entreprise «tech» et solidaire au modèle économique atypique a récolté depuis sa création un total d'un milliard d'euros, pour environ 250.000 associations, et ne compte pas s'arrêter là.

Le Figaro Bordeaux

Vous avez sûrement déjà fait un don sur leur site web, mais sans forcément connaître toute l'histoire de la plateforme HelloAsso. Organisation agréée entreprise solidaire d'utilité sociale (ESUS), et installée à Bordeaux depuis 2013, cette entreprise du numérique a pour particularité de ne prélever aucune commission : 100% de l'argent donné sur le site est reversé à l'association en question. Son modèle économique repose entièrement sur le don que peuvent faire les utilisateurs de la plateforme, et c'est une franche réussite.

«Une personne sur deux choisit de laisser une contribution volontaire au moment du paiement», explique Léa Thomassin, cofondatrice et présidente de HelloAsso. «Plus on explique le modèle et plus les personnes comprennent.» Le mois dernier, le chiffre mirobolant d'un milliard d'euros récolté a été atteint, au profit d'environ 250.000 associations. Ce fonctionnement, inspiré de la culture du pourboire aux États-Unis, était pourtant un pari risqué. «On nous a dit : vous êtes fous, on n'a pas cette culture en France, les Français sont des radins, ils ne vont rien donner», se rappelle Léa Thomassin, sourire aux lèvres.

Son développement semble donner tort à ses délateurs de la première heure : avec quatre salariés lors de sa création sous le nom de MailForGood en 2009, HelloAsso embauche aujourd'hui 130 personnes, dont une majorité dans la métropole bordelaise, au cœur de la Cité numérique à Bègles, un ancien hangar de tri postal réhabilité. Cette pépite de l'économie sociale et solidaire (ESS) continue de s'agrandir, avec 25 recrutements au premier trimestre.

La Cité numérique à Bègles se veut «le condensé de l'écosystème du digital de la métropole». HelloAsso y occupe environ un espace d'environ 1200 m2. Jean Cittone / Le Figaro

Outre son modèle économique reposant exclusivement sur le don, une autre particularité de HelloAsso est qu'elle est aujourd'hui dirigée par deux femmes, Léa Thomassin et Hannah Berkouk, vice-présidente chargée de l'impact social. Avec son équipe de direction majoritairement féminine, l'organisation entend bien faire progresser l'égalité entre les femmes et les hommes. «On est malheureusement encore trop singulières», rappelle Léa Thomassin, car seulement 17% de femmes sont aujourd'hui à la tête d'entreprises du secteur de la «tech».

L'engagement associatif, Hannah et Léa l'ont chevillé au corps. Hannah est coprésidente d'Ernest, une association de restaurateurs solidaires, et Léa est à la fois membre du conseil d'administration de la Fondation des Femmes et ambassadrice du mouvement Impact France, qui représente les acteurs de l'ESS. Toutes deux ont très tôt eu la vocation de l'économie sociale et solidaire. Dès le lycée, Léa s'intéresse au développement durable et à la nécessité «d'imaginer des formes de développement économiques compatibles avec les limites de la planète». Lorsqu'elle cofonde HelloAsso, elle a seulement 22 ans et n'est pas encore diplômée. Hannah a quant à elle réalisé un mémoire sur le mécénat d'entreprise. C'est lors d'une formation qu'elle animait sur le financement associatif qu'elle rencontre Léa, avant de devenir la dixième salariée de la plateforme.

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Un terminal de paiement en construction

Depuis, HelloAsso a changé d'échelle. «350.000 initiatives, activités ou projets associatifs ont été publiés sur HelloAsso ces douze derniers mois et 4,3 millions de personnes y ont pris part», détaille Léa Thomassin. Sur le milliard collecté, environ 7,5% ont été dédiés à des actions humanitaires et caritatives (75 millions d'euros), que ce soit pour soutenir l'Ukraine, lors des séismes survenus en Turquie et en Syrie, ou lors de campagnes annuelles, comme Octobre Rose. L'efficacité de la plateforme surprend encore parfois ses dirigeantes. En 2020, la dessinatrice Pénélope Bagieu avait mis en vente des dessins au profit de la Fondation Abbé Pierre. Les 24.000 euros demandés ont été récoltés presque instantanément, faisant d'abord croire à un «bug» technique : en 92 secondes, tout avait été vendu.

Au-delà du paiement en ligne en faveur des associations, HelloAsso veut également rendre plus visible le tissu associatif, par des partenariats avec les collectivités publiques, et en développant des outils comme BasiCompta, un logiciel de comptabilité pour les trésoriers d'associations. La plateforme organise également des formations, pour «aider les associations à se saisir des outils numériques». Depuis 2021, elle propose un véritable «moteur de recherche de la vie associative», pour trouver les organisations près de chez soi en fonction de ses centres d'intérêt. Enfin, HelloAsso travaille sur un logiciel de «tap to pay», qui permettra, au-delà des billetteries pour les évènements associatifs, d'étoffer l'application mobile existante pour en faire un terminal de paiement.

«On ne s'ennuie pas», résume Léa Thomassin. Selon elle, HelloAsso serait né d'un «vrai besoin du secteur associatif», et celui-ci perdure. Le cap symbolique du milliard est l'arbre qui cache la forêt. Sur la seule année 2022, 330 millions d'euros ont été récoltés. «On a mis quatorze ans pour récolter le premier milliard, on compte mettre un an et demi pour le deuxième», ambitionne la présidente.

Source: Le Figaro