Qu’est-ce que change l’ouverture d’une enquête préliminaire ?

July 17, 2023
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L’enquête de terrain est désormais presque terminée. Neuf jours après sa disparition, le petit Emile reste introuvable, malgré les importants moyens mobilisés. Et rien, à ce stade, ne permet d’expliquer comment cet enfant de 2 ans et demi s’est volatilisé, le 8 juillet dernier du hameau du Haut-Vernet (Alpes-de-Haute-Provence), sur les flancs du massif des Trois Evêchés, où il venait d’arriver pour les vacances d’été chez ses grands-parents maternels. Pour autant, les investigations se poursuivent. L’enquête de flagrance, ouverte le 9 juillet pour « recherches des causes d’une disparition inquiétante », a basculé ce lundi sous le régime de l’enquête préliminaire.

Ce changement de régime est « purement automatique », a précisé le procureur de la République de Digne-les-Bains, Rémy Avon. En effet, l’enquête de flagrance a été ouverte en urgence par le parquet au lendemain de la disparition d’Emile. Or, selon le Code de procédure pénale, elle « ne peut se poursuivre pendant plus de huit jours », renouvelable une fois. Une fois ce délai expiré, les « investigations peuvent se poursuivre dans les formes de l’enquête préliminaire ». La durée de ce régime d’enquête « ne peut excéder deux ans ». Elle peut toutefois être prolongée une fois pour une durée maximale d’un an.

Moins de pouvoirs d’enquête

Qu’est-ce que cela change ? Pas grand-chose, à en croire Rémy Avon. Le procureur de la République de Digne-les-Bains souligne que l’ouverture d’une enquête préliminaire ne prive les enquêteurs d’aucun outil d’investigation, que ce soit les perquisitions ou les saisies.

Ce régime d’enquête réduit pourtant (un peu) les pouvoirs des enquêteurs. « La différence majeure, c’est qu’une enquête de flagrance permet d’avoir recours à la coercition. C’est-à-dire qu’on peut interpeller, perquisitionner, saisir, sans l’assentiment de la personne », explique à 20 Minutes Aurélien Martini, vice-procureur de la République à Melun (Seine-et-Marne) et secrétaire général adjoint de l’USM (Union syndicale des magistrats). « Lors d’une enquête préliminaire, on ne peut pas interpeller ou perquisitionner », sauf avec « l’autorisation de l’autorité judiciaire, soit du procureur de la République, soit du juge des libertés et de la détention ». Ce qui se fait régulièrement dans tous les tribunaux de France.

Le procureur de la République de Digne-les-Bains aurait pu aussi requérir l’ouverture d’une information judiciaire pour « recherche des causes de la disparition », qui aurait été confiée à un juge d’instruction. Mais cette possibilité « n’est pas envisagée à ce jour », a expliqué le magistrat au Dauphiné Libéré. Le dossier restera donc piloté, pour l’instant, par le parquet. « L’intérêt majeur d’une information judiciaire, c’est de pouvoir lancer des écoutes téléphoniques avec plus de facilité », souligne Aurélien Martini.

« Il faut avoir quelque chose en ligne de mire »

« Mais il est important, quand on en ouvre une, d’avoir quelque chose en ligne de mire », insiste-t-il. « Dans les cas de disparition inquiétante, on ouvre une information judiciaire si on est à peu près sûr que c’est un enlèvement mais qu’on ignore qui est l’auteur, ou s’il existe des risques de fuite à l’étranger, ce genre de chose. Lorsqu’on ne sait pas trop où on va et qu’on tente d’éclaircir les choses, il est mieux de rester dans une phase d’enquête préliminaire. Tous les actes à réaliser peuvent l’être dans ce cadre-là. »

Enlèvement ? Accident ? Homicide ? Les gendarmes de la section de recherche de Marseille et de l’IRCGN (Institut de recherches criminologiques de la gendarmerie nationale) tentent toujours de comprendre ce qu’il s’est passé le 8 juillet dernier. Et de trouver des éléments qui les mettraient sur une piste. Les 30 maisons du hameau, rattaché au village du Vernet, ont d’ores et déjà été fouillées, tous les habitants interrogés, tous les véhicules visités. Les enquêteurs effectuent désormais un minutieux travail d’analyse des données recueillies pendant la première semaine de recherche. Il faut éplucher les 1.200 appels passés à la ligne téléphonique dédiée et de la masse considérable d’informations concernant la téléphonie de toutes les personnes ayant « borné » vers le Haut-Vernet samedi.

Source: 20 Minutes