Le Rassemblement national se délocalise au Havre pour une " fête du travail et de la patrie "
Jordan Bardella, président du RN, et Marine Le Pen lors de la « fête de la Nation », au Havre, le 1er mai. LOU BENOIST / AFP
Mais pourquoi Marine Le Pen est-elle venue au Havre le 1er mai ? Assurément pour tenter de ramasser des miettes du mouvement social contre les retraites, dans un parti qui capte l’essentiel du vote populaire. Jusqu’ici, et depuis 1979, le Front national déposait religieusement le 1er mai une gerbe aux pieds de l’une des statues de Jeanne d’Arc, mais l’enthousiasme, depuis l’exclusion de Jean-Marie Le Pen en 2015, a singulièrement molli. En 2022, sa fille s’était abstenue, et avait envoyé Jordan Bardella, le futur président du Rassemblement national (RN), piétiner une vingtaine de secondes devant une statue avec une poignée de cadres pétrifiés.
Cette fois, Jordan Bardella a choisi de faire du travail une « fête de la Nation », et au Havre, une ville qui a « une connotation industrielle et ouvrière » pour « faire un clin d’œil au monde du travail ». Le RN entend insister « sur l’histoire d’une affection introuvable entre le président de la République et le peuple français, qui menace aujourd’hui la paix sociale dans notre pays », a dit le président du parti d’extrême droite. Mais Jeanne d’Arc « reste la sainte patronne de la France », a rappelé Marine Le Pen, et le RN déposera en passant une gerbe à Rouen.
Plus malicieusement, Edouard Philippe, le maire du Havre, pourrait être l’un des candidats à la présidentielle de 2027, et Marine Le Pen, qui s’estime toujours « la mieux placée » pour concourir, est venue chatouiller l’ancien premier ministre alors que, « sur le sujet des retraites, c’est Emmanuel Macron en pire ». Edouard Philippe ne s’y est pas trompé. Il a tweeté la « une » du journal local avec l’entretien de Jordan Bardella qui assurait « Nous sommes au Havre chez nous », en ajoutant un petit mot, « mais bien sûr… »
Meubler l’agenda politique
Sur le fond, le RN n’a pas grand-chose à signaler, sinon meubler l’agenda politique, un an avant les élections européennes. Le parti a organisé un banquet dans un vaste hangar des docks, pendant que quelques milliers de manifestants organisaient une « contre-fête », à la fois contre la réforme des retraites et la venue de Marine Le Pen. Près de 1 500 militants d’extrême droite ont calmement écouté Sébastien Chenu, l’un des vice-présidents RN de l’Assemblée nationale, vanter le bilan « du groupe le plus actif, le plus mobilisé, le plus présent » de l’hémicycle, qui agit « en parfait républicain » et démontre ainsi sa « capacité, demain, à gouverner ».
Puis Marine Le Pen, entre la poire et le fromage, a tenu pendant une grosse demi-heure, sans notes mais non sans enthousiasme, un discours assez flou où surnagent quelques grandes lignes. Pour « cette fête du travail et de la patrie », elle a adressé un « salut déférent à la France laborieuse et studieuse » et a enchaîné sur le déclin de cette grande et belle nation, avec l’impression « de ne plus connaître notre pays, qui était celui de l’élégance et du raffinement » et, bien sûr, « de n’être plus chez nous ».
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Source: Le Monde