En Iran, de plus en plus de ménages ne peuvent plus payer leur loyer en raison de l’inflation galopante

July 24, 2023
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Vue de Téhéran, le 26 septembre 2022 ATTA KENARE / AFP

« La cherté hallucinante des prix sur le marché de location de logements », « la hausse vertigineuse des loyers », « un marché immobilier en plein chaos » : ces dernières semaines, l’envolée des loyers a fait les gros titres de la presse et des sites d’information iraniens.

En mai, Mahmoud (les Iraniens cités dans cet article ont souhaité l’anonymat), un habitant de Téhéran, a reçu l’appel de son propriétaire, lui annonçant que son loyer serait subitement multiplié par deux, passant à environ 300 euros mensuels. « Avec ma femme, nous nous sommes dit que ce n’était plus possible, sachant qu’on ne gagne qu’un peu plus de 330 euros par mois », explique ce comptable de 40 ans à Téhéran. Mahmoud et sa femme, productrice artisanale de fromage, ont donc décidé de vider leur appartement et de retourner vivre chez les parents de cette dernière. « Ce n’est vraiment pas évident avec un enfant de 2 ans, mais nous n’avons pas eu de choix », soutient-il.

Selon le Centre iranien des statistiques, en automne 2022, les loyers ont connu une hausse de 46 % par rapport à la même période de 2021. Une tendance qui s’est accentuée depuis. En mars, selon les données des autorités, l’inflation du rythme annuel a atteint 49,7 % (contre 40,1 % un an plus tôt) et le chômage 9,7 %, des chiffres sous-évalués selon de nombreux économistes.

D’après Bijan Khajehpour, directeur associé chez Eurasian Nexus Partners, une société internationale de conseil stratégique basée à Vienne, « l’Iran n’est pas encore entré en hyperinflation, c’est-à-dire la situation où l’inflation est supérieure à 50 % pendant quelques années consécutives ». Mais selon cet expert, le fait que l’inflation officielle soit supérieure à 40 % pendant ces cinq dernières années constitue un « phénomène nouveau. Et si cela n’est pas résolu, dans les deux, trois prochaines années, nous entrerons dans l’hyperinflation ». Un fléau qui sera très difficile à vaincre.

La monnaie iranienne, le rial, ne cesse, quant à elle, de perdre de la valeur face aux devises étrangères. Aujourd’hui, un euro s’achète, sur le marché noir, 574 000 rials, soit presque cinq fois plus cher qu’il y a cinq ans. Les prix des produits alimentaires connaissent également une flambée vertigineuse, supérieure à 40 %, obligeant les familles iraniennes à changer leurs habitudes.

Corruption endémique

Les Iraniens, contactés par Le Monde, à Téhéran, mais aussi dans d’autres villes du pays, membres de la classe moyenne, expliquent avoir été contraints de supprimer la viande et les fruits de leurs achats journaliers. « D’abord, j’ai commencé par me passer de viande rouge, en la remplaçant par de la dinde, moins chère, raconte Soureh, libraire à Téhéran et veuve, vivant avec sa fille de 17 ans. Ensuite, je me suis contentée de poulet, encore moins cher. Aujourd’hui, je ne prépare que des repas végétariens. Les fruits ne font plus partie de mes achats et je réfléchis deux fois avant d’acheter un produit laitier. Ceci alors que j’ai toujours eu les moyens de mener une vie confortable. »

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Source: Le Monde