Fondation sur Apple TV+ : l'empire court à sa perte
Cette saison 2 de l'adaptation toujours grandiose du classique de SF d'Isaac Asimov pose les jalons d'une confrontation explosive.
Création après création (Invasion , For All Mankind , Silo ), Apple TV+ s'est imposé comme un refuge pour les amateurs d'une science-fiction exigeante. Fondation, sa méandreuse adaptation du classique d'Isaac Asimov, ne déroge pas à la règle. Cette saga grandiose, parfois un peu confuse tant elle multiplie les concepts philosophiques, les personnages, leurs allégeances et les chronologies, a su poser sans se hâter les fondations de son vaste monde. Cette narration en forme de partie d'échecs demandait de la patience. Elle sera récompensée au terme d'une seconde saison plus romanesque et émotionnelle qui débouche sur l'affrontement armé inévitable des forces en présence. D'un côté, l'Empire et ses monarques clonés. De l'autre, la Fondation, entité censée préserver toute la connaissance du monde et lieu de dissidence politique. Fidèle à son aversion pour la linéarité, Fondation impose d'emblée un saut dans le temps de cent trente-huit ans. Par la magie de la science, de l'hibernation ou d'une conscience numérisée, les protagonistes sont au rendez-vous. Mais altérés, hantés par la solitude et la folie, par l'imminence de leur mort, ils sont en quête d'affection, d'amour, de connexion humaine. Autant de failles dans leurs armures.
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À la tête de la galaxie, la dynastie clonée des Cléon ne peut qu'assister au lent effritement de son empire. Ses copies de ces personnages sont de moins en moins conformes. À tel point que l'Empereur développe sa propre conscience et se soumet aux désirs de celle-ci. Songeant même à la procréation et donc à une alliance politique et matrimoniale avec la reine Sareth, souveraine du Dominion. On devine cette promise bien moins ingénue et inoffensive qu'il n'y paraît, prête à semer la paranoïa et la défiance parmi les clones.
Dans l'ombre de la Seconde Guerre mondiale
Beau comme un Apollon, Lee Pace réinvente son personnage d'autocrate égoïste. Des fêlures, la jalousie, la vulnérabilité fissurent son Cléon. Dans le camp de La Fondation, qui étend sa zone d'influence à des planètes peu hospitalières, des changements sont aussi à l'œuvre. Sujettes à des visions, les héroïnes Gaal Dornick et Salvor Hardin pressentent que l'effondrement de la civilisation et qu'un conflit frontal avec l'empire sont inéluctables. D'outre-tombe, la voix de leur mentor, Hari Seldon (Jared Harris proche de la camisole de force) reste stridente.
Assumant sa relecture libre des textes d'Asimov, bâtissant des épisodes entiers sur des digressions, le showrunner David S. Goyer continue de repousser les frontières de cet univers déroutant et fascinant. Affleurent quand même les préoccupations du romancier qui écrivait dans l'ombre de la Seconde Guerre mondiale : la répétition cyclique de l'histoire et de ses catastrophes, la tension entre la foi et la science, la lente corrosion d'une société sous emprise, la tentation de plus en plus forte de se soumettre à de faux prophètes. Au spectateur de décider si le marchand Hober Mallow, nouveau venu de cette saison, en fait partie. Comme avec un puzzle, tout ne fait sens qu'une fois la dernière pièce imbriquée.
Source: Le Figaro