Canicule aux États-Unis : 47 degrés à Phoenix, un quotidien infernal

July 28, 2023
228 views

Alors que le thermomètre affiche 47 °C, Arene Rushdan distribue de l’eau, des sandwichs et des sourires aux gens qui entrent dans la salle de réception de la First Church UCC, une église du centre-ville de Phoenix. Celle-ci a été convertie en « centre de repos », un espace climatisé pour tous ceux qui veulent échapper à la chaleur.

À l’intérieur, une quarantaine de personnes, pour la plupart sans abri, sont sur des tapis de yoga ou des chaises. « Il ne s’agit pas uniquement de leur fournir un endroit où se reposer. Nous les accueillons avec compassion. Nous ne les traitons pas comme des numéros », insiste Arene, coordinatrice au sein de l’Arizona Faith Network, l’association multiconfessionnelle qui gère ce centre et dix autres ouverts pour l’été dans des lieux de culte locaux.

Ces oasis de fraîcheur sont vitales dans une ville confrontée à une chaleur historique, une illustration de plus du changement climatique amplifié par l’action humaine. Cela fait presque un mois que les maximales ne sont pas descendues sous les 43 °C. Un record qui malmène les 1,6 million d’habitants. Enveloppée par le désert de Sonora, Phoenix est pourtant habituée aux étés intraitables. « Ce n’est pas une météo pour les faibles », résume Chris Miller, concierge dans le centre-ville.

Un mobilier urbain incandescent et dangereux

Tout est bon pour se rafraîchir. Certains sortent tôt le matin ou tard la nuit, et s’enferment dans des lieux climatisés. En plus des coins d’ombre très convoités, la gourde, le torchon mouillé ou le parapluie sont les meilleurs alliés. Dans les transports en commun, les usagers sont invités à se rendre si besoin dans un « centre de refroidissement », ces endroits publics équipés de climatiseurs.

À lire aussi Fortes chaleurs : les acteurs de la solidarité réclament un plan canicule

La menace ne vient pas que du ciel. À cause des températures, le mobilier urbain métallique (bancs, poignées, boutons pour traverser la rue…) chauffe tellement qu’il en devient dangereux. Même les trottoirs, qui ne se refroidissent pas la nuit, se transforment en pièges. Un tiers des 45 lits de l’Arizona Burn Center, un centre de traitement des brûlures, sont occupés par des personnes dont la peau est restée en contact prolongé avec l’asphalte après une chute ou un évanouissement.

Des conditions de vie très difficiles dans « la Zone »

Dans une ville en forte croissance démographique, qui manque cruellement de logements abordables, la population grandissante de sans-abri concentre les inquiétudes. En 2022, ils représentaient 56 % des 425 morts associées à la chaleur dans le comté de Maricopa, dont Phoenix est la ville principale. « Certains sont tellement fatigués par la chaleur qu’ils ne peuvent pas se lever pour se mettre au frais », observe Amy Schwabenlender, directrice du Human Services Campus, un site qui concentre une myriade de services pour les SDF.

Situé au milieu de « la Zone », un campement de fortune où près de 900 d’entre eux vivent sous des tentes, le campus voit défiler des personnes déshydratées ou victimes de coups de chaleur potentiellement mortels. Ces problèmes s’ajoutent à des maladies physiques et mentales diverses, comme l’addiction aux opioïdes.

Un bureau d’atténuation de la chaleur

« Certains de leurs médicaments perdent de leur efficacité quand ils sont exposés à la chaleur, d’autres au contraire peuvent accroître le risque de déshydratation, observe Perla Puebla, infirmière à l’association médicale Circle The City, sur le campus. L’intensification de la chaleur va représenter un défi durable pour nous. »

Pionnière de la climatisation centralisée, technologie qui a permis son essor au XXe siècle, la municipalité est l’une des rares à s’être dotée d’un « bureau d’atténuation de la chaleur », pour mettre en œuvre des politiques visant à limiter les effets du réchauffement (plantation d’arbres, adaptation des infrastructures, ouverture de salles de repos…). Il y a urgence. « Nous avons ignoré les scientifiques pendant trop longtemps sur la question du changement climatique », estime Susan Valiquette, pasteure de la First Church UCC. « En tant que chrétiens, nous aimons nos voisins et nous les aidons en temps de crise. Or, nous en vivons une. »

-----

Plus de 100 millions d’Américains confrontés à des records de chaleur

« Plus de 100 millions d’Américains » sont confrontés actuellement à des records de chaleur, selon Joe Biden, qui a qualifié le changement climatique de « menace existentielle », jeudi 27 juillet.

La chaleur est la première cause de mortalité liée au climat et aux conditions météorologiques aux États-Unis, avec 600 victimes par an, plus que les inondations et les ouragans.

Le président américain a annoncé une série d’actions pour renforcer les capacités de stockage d’eau dans l’ouest des États-Unis, améliorer le système national de prévisions météo et mieux protéger les travailleurs les plus exposés.

Source: La Croix