Birmanie : Aung San Suu Kyi en partie graciée par la junte
Aung San Suu Kyi, lors d’un discours à Naypyidaw, au Myanmar, le 28 janvier 2020. AUNG SHINE OO / AP
Le singulier destin de la dirigeante birmane déchue Aung San Suu Kyi vient de prendre un nouveau tournant, mardi 1er août, confirmant le caractère décidément bien improbable d’une vie marquée par l’enfermement, le pouvoir et l’adulation collective : en prison depuis le coup d’Etat militaire de février 2021, l’ancienne dissidente, devenue cheffe du gouvernement, vient d’être, au moins partiellement, graciée par celui-là même qui l’avait démise, le général Min Aung Hlaing, chef de la junte.
Condamnée en décembre 2022 à trente-trois ans de prison à l’issue d’un simulacre judiciaire de dix-huit mois au cours desquels elle avait été accusée, entre autres charges, de corruption, de violations de secrets d’Etat et des restrictions imposées au cours de la pandémie de Covid-19, Mme Suu Kyi, âgée de 78 ans, pourrait même, selon des informations encore partielles, être bientôt libérée. Pour l’instant, rien n’est confirmé à ce sujet : il semble qu’au moins une partie de sa sentence ait été allégée et cinq de ses dix-neuf condamnations graciées.
Un communiqué laconique lu au journal télévisé a simplement annoncé, mardi, que Mme Suu Kyi, « qui [avait été] condamnée par des tribunaux compétents » a été « graciée en vertu de la loi sur les droits de l’homme ». La mesure concerne également sept mille prisonniers et correspond aux amnisties traditionnellement accordées à l’occasion du début du carême bouddhique, qui dure trois mois.
Cette grâce, même partielle, était imprévisible, même dans ce « Myanmar » – nom officiel du pays – à l’opacité politique légendaire : nombre d’observateurs de la vie politique birmane redoutaient que l’ancienne Dame de Rangoun, son surnom au temps de ses années de dissidence, ne finisse ses jours en prison. Il est vrai que la situation est catastrophique et les généraux songent sans doute, comme leurs prédécesseurs l’ont fait dans le passé, au temps d’autres dictatures militaires, à élaborer une nouvelle stratégie menant à l’organisation d’élections destinées à assurer au régime une légitimité de façade.
Guerre civile
Car deux ans et demi après le coup d’Etat, la guerre civile fait rage sur une grande partie du territoire et la résistance des guérillas des minorités ethniques appuyée par les groupes armés issus de la société civile a empêché jusque-là les militaires de mater les rebelles. Plus de trois mille personnes ont été tuées depuis février 2021 durant les manifestations antirégime puis lors des combats entre la Tatmadaw – l’armée – et les résistants.
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Source: Le Monde