Mort de l’ancien président ivoirien Henri Konan Bédié, chantre de l’" ivoirité " et éternel Machiavel

August 02, 2023
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Henri Konan Bédié, à Abidjan, le 31 décembre 2020. SIA KAMBOU / AFP

Comme si le presque nonagénaire avait fini par échapper à sa condition humaine, personne ne semblait s’attendre à sa mort, mardi 1er août. A 89 ans, l’ancien président ivoirien (1993-1999) Henri Konan Bédié était encore le maître tout-puissant du Parti démocratique de Côte d’Ivoire-Rassemblement démocratique africain (PDCI-RDA) et l’un des piliers de la vie politique du pays. Connu pour son mutisme et son flegme, il préparait d’une main les élections municipales et régionales du 2 septembre, de l’autre le congrès de sa formation politique, en octobre. Deux chapitres décisifs pour l’avenir du PDCI en vue de l’échéance présidentielle de 2025.

Dès l’annonce de son décès à Abidjan, où, depuis son fief de Daoukro (centre), il avait été héliporté en urgence quelques heures plus tôt, des dizaines de militants du PDCI se sont rassemblés dans sa villa du quartier de Cocody. « Je n’arrive pas à y croire. Parce qu’avant-hier, j’étais avec lui à Daoukro, on a déjeuné et échangé ensemble, il n’était pas fatigué, il était en pleine forme, on a pris des photos ensemble. On était en train de préparer les élections avec lui, c’est vraiment un coup dur », se désole Cyril Yobouet, coordonnateur des mouvements associatifs du PDCI-RDA.

« Je n’y croyais pas, c’est pour ça que je suis venu ici. Nous allons repartir sur le terrain et nous allons demander aux militants de faire en sorte que le PDCI remporte les élections pour rendre ce dernier hommage à notre président », assure Innocent Kouamé Kouassi, candidat aux élections municipales dans la ville de Guitry, à 150 km à l’ouest d’Abidjan.

Une ascension politique rapide

Né le 5 mai 1934 dans le village de Dadiékro, au centre du pays, « N’Zueba » (l’enfant de la pluie, en baoulé) a connu une ascension politique rapide. Dans les années 1960, il s’engage auprès du père de l’indépendance, Félix Houphouët-Boigny, au PDCI-RDA, alors parti unique.

A seulement 26 ans, il devient le premier ambassadeur de Côte d’Ivoire aux Etats-Unis et au Canada, avant d’obtenir à 32 ans le portefeuille de l’économie et des finances. En 1980, il devient président de l’Assemblée nationale et le reste jusqu’en 1993, à la mort de Félix Houphouët-Boigny. Sa rivalité avec Alassane Ouattara, qui prétend aussi à la succession du premier président ivoirien, éclate alors au grand jour. Elle ne s’éteindra jamais.

« HKB » assure la présidence de la République par intérim jusqu’à l’élection de 1995. Ces deux années sont marquées par la crise économique, liée notamment à la perte de vitesse de la filière cacao. Henri Konan Bédié promeut alors le concept controversé d’« ivoirité », une forme de préférence nationale glorifiant l’identité culturelle et la souveraineté, agitée contre les populations musulmanes du nord du pays. Il est accusé de la brandir pour disqualifier Alassane Ouattara.

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Source: Le Monde