Gymnastique : le tribunal de Marseille dresse la frontière de l’inacceptable entre la dureté des entraînements de haut niveau et le " harcèlement moral "

May 04, 2023
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L’affaire a mis fin au tabou sur les méthodes d’entraînement des gymnastes de haut niveau, ces adolescentes aux rêves de podiums et de Jeux olympiques. En condamnant, jeudi 4 mai, Vincent Pateau, entraîneur de l’équipe de France, pour harcèlement moral à six mois de prison avec sursis et à une amende de 10 000 euros, le tribunal correctionnel de Marseille a dessiné une frontière entre les sacrifices induits par le sport de haut niveau et des comportements à même d’altérer la santé physique et psychique des jeunes sportives.

Le tribunal n’a pas prononcé l’interdiction professionnelle requise par le parquet de Marseille contre le responsable technique du Pôle France gymnastique féminine de Marseille, qui avait comparu le 31 mars après les plaintes déposées en 2021 par cinq jeunes pensionnaires. Le tribunal a fait le choix d’une « peine à la fois significative pour prendre en compte l’intérêt des victimes et suffisamment importante pour dissuader de toute réitération d’actes similaires mais donne également la chance à [Vincent Pateau] de modifier son attitude et de poursuivre son activité professionnelle ».

Ce jugement de Salomon satisfait néanmoins Me Anne-Laure Rousset, avocate de quatre gymnastes aujourd’hui âgées de 14 à 21 ans, qui s’étaient constituées partie civile : « Le tribunal reconnaît le harcèlement sportif et dit que les victimes ne sont pas des menteuses. Cette décision va leur permettre de se réparer et d’avancer. »

« Tu es une grosse merde »

Vincent Pateau a été condamné pour des faits de harcèlement moral sur trois des cinq plaignantes mais relaxé concernant deux autres, le tribunal se livrant à une analyse minutieuse des propos et des comportements de l’entraîneur dénoncés comme humiliants et dégradants. La répétition d’un exercice tant qu’il n’est pas maîtrisé n’est pas significative d’un harcèlement, notent ainsi les juges qui font la part entre des propos qui traduisent « la dureté de l’entraînement de haut niveau » et des agissements répétés de nature à blesser. Ainsi la phrase « je veux des putes sur la poutre » ou le renvoi au vestiaire pour quelques heures ne sont pas condamnables à la différence de l’ordre de faire plusieurs allers-retours sur la corde lisse avec des « steaks » – des ampoules éclatées dans la paume des mains – sous le regard des autres, assises en rond.

Face aux juges, Vincent Pateau avait reconnu avoir « fait des conneries » et « mal géré des choses ». Mais il contestait certains propos rapportés par les plaignantes : « Tu es une grosse merde, tu es une faible, une chialeuse » ou encore « T’as déjà vu un éléphant faire un double tendu au sol ? »

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Source: Le Monde