Des mouvements écologistes organisent une manifestation contre "l'inutile et funeste projet d'autoroute" à Rouen

May 06, 2023
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Ce projet d'une nouvelle route qui relierait l'A28 et l'A13 suscite une vive opposition en Normandie. «Les Soulèvements de la Terre» appellent à une forte mobilisation ce samedi 6 mai.

Un projet qui divise. Le futur contournement Est de Rouen, véritable serpent de mer, suscite de vives oppositions alors que les engins de construction ne sont même pas encore sur place. Cette nouvelle portion d'autoroute, qui serait constituée de deux fois deux voies, relierait l'A28 et l'A13 et mesurerait près de 41 kilomètres. Si le calendrier reste inchangé, la route devrait être construite dès 2031.

Ce samedi 6 mai, plusieurs mouvements écologistes, dont «Les Soulèvements de la terre» et le collectif «Non à l'A133-A134», se sont donné rendez-vous pour protester contre la construction de cette autoroute.

Une histoire qui dure depuis une quarantaine d'années

Si le projet est sur la table depuis les années 1980, c'est en 2017 qu'il a pris une nouvelle tournure en étant déclaré d'«utilité publique». En 2020, le Conseil d'État a rejeté l'ensemble des recours qui avaient été déposés par le collectif «Non à l'A133-A134» et par des élus hostiles au projet. Ce dernier a alors été identifié comme l'un des «quatre projets autoroutiers prioritaires au plan national par la loi d'orientation des mobilités du 24 décembre 2019». En décembre 2021, Jean Castex, premier ministre à l'époque, l'a officiellement validé au nom de l'État. Le gouvernement justifiait la construction de cette autoroute par la nécessité «de détourner du cœur d'agglomération une grande partie des trafics de transit et d'échanges, notamment de poids lourds», de «décongestionner les voies pénétrantes sur l'agglomération» et d'améliorer «les liaisons entre l'agglomération rouennaise et l'Eure».

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Plusieurs acteurs économiques normands ont largement salué ces décisions. La Chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Rouen a envoyé un courrier à Élisabeth Borne, le 3 mai dernier, pour réclamer des avancées plus rapides et des garanties, rapporte France Bleu . «Pour les entreprises, pour la métropole, pour l'attractivité, pour la formation. Cela fait trop longtemps qu'on attend des dessertes de qualité», a affirmé Vincent Laudat, précisent de la CCI Rouen Métropole, rapporte France 3. Un automobiliste passe «cent heures par an dans les bouchons à Rouen», a-t-il également ajouté en pointant du doigt la construction de la ville, constituée de «routes pénétrantes» qui provoquent une circulation dense.

Au-delà des gains de temps, le groupe Renaissance a également défendu l'idée d'un impact écologique moindre : ce projet va permettre de «développer la métropole et de réduire la pollution atmosphérique», a souligné le député de la majorité de la Seine-Maritime, Damien Adam avant d'ajouter : «Pour 1 hectare pris, il faudra “renaturer” 3 hectares, ce qui permettra de réhabiliter des friches. Et l'on pourra inciter des acteurs économiques à s'installer sur des terres peu attractives», rapporte Le Monde . Ainsi, il n'y aurait pas de contradiction avec l'objectif zéro artificialisation nette exigée par la loi Climat et résilience d'août 2021, selon lui.

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«Éviter les contrôles de police»

Mais pour certains collectifs et politiques, le coût écologique est tout de même trop élevé. Au total, près de 41,5 kilomètres d'autoroute seraient construits, nécessitant l'artificialisation de plus de 500 hectares dont 269 hectares de terres agricoles et 142 hectares de forêt, nous informe le rapport d'enquête publique. Le coût financier aussi dérange. Le financement du projet, estimé à 886 millions d'euros selon les dernières données datant de 2015, serait partagé entre l'État, les collectivités locales et des concessionnaires.

L'opposition se veut donc virulente. Le collectif «Non à l'autoroute A133-1134» prépare quatre cortèges pour ce samedi 6 mai, «guidés par les quatre espèces totems de la forêt du Bord menacées par le projet d'autoroute» : le cortège Pic Mar, le cortège Muscardin, le cortège Triton crêté et le cortège Grand capricorne.

Cette manifestation s'inscrit par ailleurs dans le cadre d'un rassemblement qui va durer quatre jours. Le Festival «Des bâtons dans la route» a lieu près de Léry du 5 au 8 mai et vise à fédérer les opposants au projet autoroutier. Au programme : tables rondes, projections de films, manifestation et «grand pique-nique champêtre». Le lundi 8 mai sera pour sa part consacré à l'assemblée générale des opposants au projet. Le collectif «Non à l'autoroute A133-1134» a déjà publié sur Twitter un numéro à contacter pour «éviter les contrôles de police», qui sont «à prévoir aux abords du camp». D'autres organisations écologistes soutiennent le rassemblement, comme «La déroute des routes» ou «Naturalistes des terres».

Crainte d'une «ZAD»

Le maire PS de Rouen Nicolas Mayer-Rossignol, opposé au projet, a affirmé au micro de 76actu qu'il y avait «une forte probabilité, un vrai risque» que cette opposition ne devienne une «ZAD». Or, cette manifestation intervient quelques semaines après les très violents affrontements à Sainte-Soline contre les bassines d'eau, qui ont fait plus de 200 blessés et après lesquels le ministre de l'Intérieur a déclaré que «plus aucune ZAD» ne s'installerait dans le pays. «Ni à Sainte-Soline, ni ailleurs». Le tribunal administratif de Rouen, statuant en référé, a suspendu le vendredi 5 mai un arrêté préfectoral qui prévoyait l'usage de drones pour ce rassemblement.

Source: Le Figaro