Michelle Williams, incarnation de l’Amérique vagabonde
Michelle Williams dans « Showing Up », de Kelly Reichardt. ALLYSON RIGGS/DIAPHANA DISTRIBUTION
« Avec mes amis, je suis plutôt simple et transparente. Si vous me croisiez par hasard dans la rue, vous le saisiriez tout de suite. Avec les journalistes, c’est plus compliqué. Si je cherche à être authentique, à engager un dialogue vrai – lequel me donne souvent à réfléchir –, et que cela me revient déformé, si je dis des choses importantes, qui, une fois publiées, perdent de leur sens et de leur poids, tout cela peut faire mal… » Au téléphone, de l’autre côté de l’Atlantique, à Brooklyn, où elle habite depuis des lustres, Michelle Williams a la voix douce mais résolue. A 42 ans – dont trente devant la caméra –, elle en a vu défiler des reporters qui lui demandaient de raconter sa vie.
Rendez-vous manqué, en 2022, au Festival de Cannes (l’actrice était enceinte), où le film de Kelly Reichardt, Showing Up, qui sort aujourd’hui, était présenté. Depuis, on l’a vue dans The Fabelmans, de Steven Spielberg, en incroyable mère délurée de ce vrai-faux biopic du réalisateur. Rôle un brin ironique quand on sait qu’elle commença sa carrière en 1998 dans la série Dawson, adolescente découvrant auprès de son soupirant cinéphile que « tout l’univers est dans Spielberg ».
La suite ressemble aux mille mues d’un caméléon. Actrice « polymorphe », pour reprendre le mot de Kenneth Lonergan, qui la dirigea dans Manchester by the Sea (2016), pour lequel elle sera de nouveau nommée aux Oscars, dix ans après Le Secret de Brokeback Mountain (2005). Capable de se transformer en Marilyn Monroe devant la caméra de Simon Curtis (My Week with Marilyn, 2011), comme de signer pour la franchise Marvel (Venom, 2018 et 2021), Michelle Williams n’aura cessé, en une quarantaine de films, d’alterner longs-métrages indépendants (I’m Not There, de Todd Haynes, en 2007) et blockbusters (Shutter Island, de Martin Scorsese, en 2010, Tout l’argent du monde, de Ridley Scott, en 2017…).
Quatre films avec Kelly Reichardt
Au sein de cette filmographie, la réalisatrice Kelly Reichardt tient une place toute particulière. Ensemble, les deux femmes ont tourné quatre films (sur les huit qui composent l’œuvre de la cinéaste). « En tant qu’amie, Kelly est la plus drôle des femmes, confie la comédienne. En tant que réalisatrice, elle est sans compromis, précise, directe. Elle a une vision très claire de ce qu’elle veut, elle sait comment y arriver, et elle vous y emmène. »
Des amis communs, New York, une rencontre à un concert de Yo La Tengo… C’est le cinéma qui va vraiment les réunir et les souder. « J’avais beaucoup entendu parler d’elle comme réalisatrice, raconte Michelle Williams. Alors je me suis procuré Old Joy [2006]. Et j’ai eu envie d’entrer dans son univers. Je voulais qu’elle me choisisse, devenir une “actrice Kelly Reichardt”. J’ai reçu et lu le scénario de Wendy et Lucy [2008], et j’ai dit oui immédiatement. C’est là, lorsque j’ai été m’installer à Portland [Oregon] avec ma fille pour travailler sur le film, qu’on s’est vraiment connues intimement. »
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Source: Le Monde