Inde : flambée de violences interethniques dans l’Etat de Manipur
A Imphal, capitale de l’Etat du Manipur, situé dans le nord-est de l’Inde, le 4 mai. AFP
Comme souvent en Inde, la violence a surgi brutalement et s’est propagée comme une traînée de poudre. Le petit Etat de Manipur au nord-est du pays, à la frontière Birmane, qui compte 3,5 millions d’habitants est en proie, depuis le 3 mai, à des affrontements interethniques meurtriers. Soixante personnes ont péri, selon le gouvernement local, 1 700 maisons ont été incendiées, ainsi que des temples, des églises et des véhicules, et plus de 35 000 auraient été déplacées et accueillies dans des camps de secours. Des milliers de soldats ont été déployés, avec ordre de tirer à vue si nécessaire, et un couvre-feu a été décrété. Internet a été suspendu.
Le conflit oppose les Meiteis, l’ethnie dominante qui représente 53 % de la population de Manipur, majoritairement hindoue, installée dans la vallée fertile d’Imphal, située au centre de l’Etat, aux Kukis, des tribus Chin des collines, de confession chrétienne essentiellement. Depuis des années, les Meiteis réclament d’être inclus dans la liste officielle des tribus répertoriées. Cette désignation, dont bénéficient les deux tribus principales de Manipur, les Nagas et les Kukis, environ 40 % de la population, est réservée aux groupes ethniques jugés défavorisés et isolés. Elle confère des quotas d’emplois dans l’administration et des places dans les universités publiques. L’enjeu économique est important, car les Etats du nord-est de l’Inde accusent un retard de développement, et les postes publics constituent la principale source d’emploi.
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Le 27 mars, la Haute Cour de Manipur a considéré que la demande des Meiteis était justifiée, et a donné au gouvernement de Manipur un délai de quatre semaines pour envoyer ses recommandations au gouvernement central. Cette décision a provoqué la colère des communautés indigènes. Le 3 mai, une association étudiante a pris la tête d’une « marche de solidarité tribale » organisée dans tous les districts des collines. La ville de Churachandpur, territoire essentiellement Kuki, s’est embrasée la première, puis la violence a gagné les autres villes. Les tribus redoutent que les Meiteis leur prennent leur travail et puissent également acquérir, en accédant au statut de tribu répertoriée, des terres forestières ancestrales dans les collines et les montagnes.
Retour au calme
Après quatre jours d’émeutes, la situation semblait sous contrôle, lundi 8 mai. « Le calme est revenu, mais nous sommes toujours soumis à un couvre-feu et sans Internet. Les informations nous parviennent avec parcimonie, témoigne par téléphone Rakesh Banta, un chef d’entreprise, installé dans la capitale Imphol. Mais il y a énormément de soldats dans les rues. » Le ministre de l’intérieur, Amit Shah, a tenté de calmer les esprits en assurant que l’ordonnance du tribunal sera « discutée avec toutes les parties prenantes concernées, et le gouvernement du Manipur prendra une décision appropriée après consultation ». « Aucune personne ni aucun groupe ne doit avoir peur », a-t-il déclaré sur la chaîne India Today.
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Source: Le Monde