En Equateur, sur fond de flambée de violences, le président Guillermo Lasso est menacé de destitution

May 10, 2023
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A l’Assemblée nationale équatorienne, à Quito, le 9 mai 2023. RODRIGO BUENDIA / AFP

Il n’est pas sûr que le très impopulaire président équatorien finisse son mandat. Mardi 9 mai, à Quito, l’Assemblée nationale a donné son feu vert à un procès en destitution de Guillermo Lasso (droite). Le chef de l’Etat est accusé de malversation. Sur les 116 députés présents, 88 se sont prononcés en faveur de la procédure, au terme de laquelle ils devraient voter le 23 mai, à moins que M. Lasso n’opte pour la dissolution du Parlement. La Constitution de 2008 lui octroie en effet ce droit.

Dans ce pays de 18 millions d’habitants en proie à une vague de violences criminelles sans précédent, M. Lasso, 67 ans, semble toutefois bien fragile pour jouer cette carte : un récent sondage lui donne 83 % d’opinions défavorables. L’Assemblée nationale, presque aussi discréditée, se pose en porte-voix du mécontentement populaire. L’opposition y est majoritaire mais profondément fragmentée. Elle réunit en effet les « corréistes » de la coalition Union pour l’espérance (gauche), partisans de l’ancien président (2007-2017) Rafael Correa, le vieux Parti social-chrétien (conservateur) et Pachakutik, bras politique de la puissante Confédération des nationalités indigènes.

M. Lasso est accusé de ne pas s’être opposé au renouvellement d’un contrat public de transport de pétrole brut entre l’entreprise publique Flota Petrolera Ecuatoriana et le groupe international Amazonas Tanker, alors qu’il aurait été averti des dommages encourus par l’Etat, évalués à quelque 6 millions de dollars (5,4 millions d’euros) de perte. Deux autres chefs d’accusation formulés contre M. Lasso n’ont pas été retenus par la Cour constitutionnelle qui, le 29 mars, autorisait le procès en destitution.

Malgré ce feu vert, les partisans du chef de l’Etat dénoncent un « coup d’Etat parlementaire », arguant que l’opposition n’a pas pris en compte un rapport de la commission de surveillance assurant qu’il n’y avait pas suffisamment de preuves contre M. Lasso. Premier à réagir, le ministre de l’intérieur, Henry Cucalon, a pourfendu sur Twitter « un processus illégitime et légalement vicié qui est né, qui se poursuit et qui terminera sans preuves ni arguments ». Le ministre s’est engagé à « défendre le droit des Equatoriens à vivre en démocratie ». Le président Lasso a, lui, gardé le silence.

Potion ultralibérale

Un temps étiqueté comme le pays le plus instable du continent, l’Equateur n’en est pas à sa première destitution présidentielle. Entre 1997 et 2005, trois chefs d’Etat – Abdala Bucaram Ortiz, Jamil Mahuad Witt et Lucio Gutierrez – ont, en effet, vu leur mandat interrompu sous la pression de la rue. Cette fois, c’est l’Assemblée nationale qui mène le jeu.

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Source: Le Monde