Festival de Cannes : " Jeanne du Barry ", un premier choc signé Maïwenn

May 16, 2023
242 views

Un film en costumes signé par Maïwenn ? Le projet avait de quoi surprendre. La réalisatrice est connue pour son cinéma bavard, exalté, bouillonnant, souvent intimiste, de « Pardonnez-moi » à « ADN », en passant par « le Bal des actrices » ou « Polisse ». C’est en découvrant la comtesse du Barry dans le « Marie-Antoinette » de Sofia Coppola, en 2006, que la cinéaste a commencé à se passionner pour cette courtisane, fille illégitime d’un moine et d’une cuisinière, devenue la favorite de Louis XV et objet d’un scandale à la Cour de Versailles. Avec « Jeanne du Barry », Maïwenn a totalement changé de méthode - elle a filmé en pellicule, renoncé à l’improvisation et posé sa caméra pour des plans séquences -, mais conservé son style passionné, habité, vivant.

Dans des décors et costumes somptueux, les personnages échangent dans une langue libre et légère. Une voix off percutante complète le récit (« Les filles de rien ne sont-elles pas prêtes à tout ? », « À quoi bon être innocente si les autres ont pour vous des désirs coupables ? », « C’est grotesque/Non, c’est Versailles »). « Jeanne du Barry » nous plonge dans les us et coutumes de la Cour au XVIIIe siècle via des séquences souvent comiques. Comme celles du lever du roi ou de l’examen gynécologique d’une courtisane finalement considérée comme « digne de la couche royale ».

Une splendide histoire d’amour

Si « Jeanne du Barry » se révèle étonnamment contemporain, c’est à cause de son propos : le film, à travers lequel Maïwenn rapporte en creux sa trajectoire, elle qui fut l’épouse de Luc Besson à 16 ans avant de se lancer dans le cinéma, raconte l’ascension sociale d’une roturière rejetée par la Cour. Il retrace aussi le destin d’une femme « vendue » par sa mère, humiliée et violentée par les hommes et pourtant excitée d’être « offerte » au roi.

La réalisatrice a soigné ses personnages secondaires : le comte du Barry (interprété par un Melvil Poupaud glaçant) est cynique et détestable, le valet du roi méticuleux et attachant (génial Benjamin Lavernhe) et la fille de Louis XV (India Hair, très drôle) d’une méchanceté qui convoque celle des sœurs de Cendrillon. Face à une Maïwenn totalement habitée par son rôle, Johnny Depp, avec seulement quelques répliques et malgré son accent américain, impose sa présence. Et donne à ce film qui est aussi - surtout - une histoire d’amour un côté conte de fées, rehaussé par une mise en scène magnifique.

Source: Le Parisien