Cannes 2023 : " Killers of the Flower Moon ", Martin Scorsese sur la terre meurtrie des indiens Osage
William Hale (Robert De Niro) et Ernest Burkhart (Leonardo DiCaprio) dans « Killers of the Flower Moon », de Martin Scorsese. PARAMOUNT PICTURES
CANNES PREMIÈRE - HORS COMPÉTITION
Martin « magic » Scorsese, 80 printemps comme Harrison Ford, qui l’a précédé à la projection de gala du Théâtre Lumière de Cannes, semble n’avoir rien perdu de son « flow ». Débit de mitraillette, allure de lutin électrique, ce gracieux maître de guerre est venu chercher, la larme à l’œil, samedi 20 mai, son lot d’amour et de reconnaissance éperdus auprès d’un parterre de spectateurs qui s’entretuaient un jour avant pour obtenir un billet.
Killers of the Flower Moon (« Les tueurs de la fleur de lune »), son nouveau film, commence, pour les connaisseurs de l’histoire du cinéma américain, comme une discrète réminiscence d’un titre antérieur, The Honeymoon Killers (« Les tueurs de la lune de miel »), film mythique réalisé en 1970 par Leonard Kastle, adaptant au cinéma les méfaits du couple de tueurs en série Raymond Fernandez et Martha Beck – et que le jeune Martin Scorsese, alors auteur d’un premier long métrage prometteur (Who’s That Knocking at My Door), devait réaliser, avant d’être congédié une semaine plus tard.
Un demi-siècle plus tard, « Marty » revient avec une enveloppe de 200 millions de dollars (185 millions d’euros) alloués par la société Apple, et adapte au cinéma le best-seller homonyme du journaliste David Grann paru en 2017.
Killers of the Flower Moon est le récit d’une tribu indienne, les Osage, qui, déjà saignée à blanc par la conquête de l’Ouest, s’était vu confiner dans la réserve aride de Gray Horse dans l’Oklahoma, où l’on espérait sans doute la voir se transformer en pierre. Or la nation décimée se retrouve, apparaît-il, sur le plus grand champ pétrolifère des Etats-Unis. La voilà, par une claire ironie de l’histoire capitaliste, qui roule sur l’or. La voilà victime, aussi bien, de morts pour le moins mystérieuses, qui se révéleront être des meurtres en série. L’affaire est confiée, en 1921, au Bureau of Investigation (le futur FBI), à la tête duquel officie un jeune homme ambitieux nommé Edgar J. Hoover.
Chanson de geste sanglante
Soit, une vingtaine d’années après Gangs of New York – tableau boucher de la guerre des gangs opposant les « Natifs » aux Irlandais – un nouveau regard rétrospectif sur l’origine des Etats-Unis, chanson de geste sanglante d’un pays miné par la violence dans sa constitution même, dont Scorsese se fera l’un des hérauts parmi les plus convulsés de Hollywood. Ajoutons ici, s’agissant du sort des nations autochtones, la dimension proprement génocidaire de la conquête du pays et l’on comprendra que Flowers of the Killer Moon est un film qui devrait faire grincer comme jamais.
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Source: Le Monde