Les films à la moulinette de l’intelligence artificielle pour prédire leurs recettes

May 21, 2023
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Au cinéma UGC de la Galerie de la Toison d'Or, à Bruxelles, le 30 décembre 2021. FRANCOIS WALSCHAERTS / AFP

Prévoir et améliorer les recettes financières d’un film en utilisant l’intelligence artificielle (IA). Cette idée, qui pourrait marquer le triomphe absolu du marketing sur le septième art, a germé dans la tête d’un Turc, Sami Arpa, docteur en informatique à l’Ecole polytechnique de Lausanne. Cet homme féru de chiffres autant que d’esthétique, s’avoue fervent admirateur du réalisateur de son pays Nuri Bilge Ceylan, qui présente au Festival de Cannes Les Herbes sèches. Un film d’auteur, qui semble bien loin des canons de l’IA.

Depuis 2018, Largo.ai, l’entreprise de Sami Arpa, sise à Lausanne et implantée à Los Angeles, Londres et Istanbul, commercialise des recommandations aux producteurs ou réalisateurs, fondées sur plus d’un millier de paramètres. « Le scénario, le genre, la langue et les lieux de tournage, le casting », déclare-t-il. C’est le seul, dans ce micromarché de l’IA du cinéma − aux côtés des américains Cinelytic et StoryFit, et de l’israélien Vault IA − à suggérer des noms d’acteurs.

Largo.ai crée des schémas qui permettent « de voir les faiblesses d’un scénario, de suggérer de modifier la dynamique de chacun des rôles, d’en atténuer certains, d’en pousser d’autres pour relancer l’intensité émotionnelle », explique le PDG. Surtout, il effectue des prévisions de recettes en salles ou d’audience sur les plates-formes de streaming, selon les pays et le public touché (en fonction du sexe, de l’âge et de l’assiduité au cinéma).

« Ce sont des propositions. Nos clients peuvent les suivre ou non », tempère Sami Arpa, en assurant avoir déjà fidélisé deux des grandes majors hollywoodiennes, dont il tait le nom « pour des raisons de confidentialité », et conseillé Florian Zeller sur The Father, pour améliorer sa distribution. Ou être intervenu pour Olga, d’Elie Grappe ou Le Mystère Henri Pick, de Rémi Bezançon.

« On va voir ce que l’industrie accepte »

Pour convaincre les professionnels réunis à Cannes des bienfaits de Largo.ai, une quinzaine de ses clients, en quête de financements pour boucler leurs projets, ont chacun, en trois minutes, présenté leur scénario, leur budget et le résultat des oracles financiers et de casting de Largo.ai. Des fictions, des dessins animés, des documentaires, des films d’horreur, de science-fiction… Pour l’un, le rôle-titre suggéré était Mel Gibson, pour d’autres Kristen Stewart ou encore Eva Green.

Largo.ai a prédit 13,9 millions de dollars de recettes (12,9 millions d’euros) pour un petit film d’horreur, The Signal, ou encore un ratio de retour sur investissement de 646 % pour un drame familial signé Vincent Lin. Un producteur dans la salle a souri : « Ce serait si facile si cela remplaçait nos équipes… »

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Source: Le Monde