Festival de Cannes 2023 : Marion Cotillard donne tout sur la mère de Mona Achache
Parler du corps de la femme, surtout lorsque c’est sa propre mère, ce n’est pas évident. La réalisatrice Mona Achache (Le Hérisson) en a fait le pari fou, après avoir découvert à la mort de sa mère une documentation extraordinaire : enregistrements, photos, souvenirs. Elle en a eu l’idée d’un film, une fiction documentaire, proche du réel tant la matière pour le réaliser est colossale. Et pour incarner celle qui l’a enfantée, elle a choisi Marion Cotillard.
« J’ai vu Marion en sachant que je voulais qu’elle soit ma mère, mais je n’avais pas fini mon travail d’écriture, donc je ne disais rien… », explique la réalisatrice à 20 Minutes. Bien qu’amies dans la vie, les deux femmes ont réussi par leur travail, main dans la main, avec leurs singularités, à créer un objet cinématographique hors normes, très fin, très bien construit. « On a partagé assez rapidement des conversations très profondes sur le film, mais bien au-delà. Sur la place de la femme, celle de l’homme, sur la relation des deux, et parfois qui mène à l’abandon de l’harmonie. Comment guérir de ses relations qui sont parfois si compliquées et destructrices ? », questionne Marion Cotillard.
Un film intime, l’histoire d’une mère, d’une femme
Ils sont nombreux à avoir traité leur rapport à leur mère, voire à leur père, via le cinéma. Mais ici, pour ce film Little Girl Blue, Mona Achache offre à Marion Cotillard tout ce qu’une actrice peut rêver. Une liberté d’interpréter, malgré l’attache entre la réalisatrice et le sujet de son film, des enregistrements et des carnets avec des compositions détaillées pour incarner cette femme intellectuelle. « J’ai très vite partagé à Mona la manière dont son histoire résonnait dans ma propre histoire, dans ma propre lignée de femmes et dans l’histoire universelle des femmes », raconte Marion Cotillard.
« Ce qui m’a plu, tout de suite, dans ma rencontre avec Marion, c’est que… Tu m’as beaucoup parlé de toi », explique Mona Achache. Et c’est d’ailleurs ce point très précis qui fait du film une merveille à voir. La ressemblance est forte, notamment dans la voix et l’attitude. Mais surtout l’invisible, qui passe par le corps d’une femme à la fois fragile et puissante, qui a tout vécu, tout ressenti, tout questionner, jusqu’à se donner la mort - histoire vraie oblige, pas de spoiler en vous l’écrivant.
L’une des meilleures incarnations de Marion Cotillard
« Son expérience avec sa mère, son ressenti, sa vision ne m’ont pas empêché d’avoir mon propre chemin avec cette femme, mes propres émotions (…) j’avais besoin de la comprendre de l’intérieur, c’est ce qui est passionnant avec le métier d’actrice, c’est d’aller explorer des endroits qui ne seront pas forcément explorés par des gens de sa famille, et de partager ça avec la réalisatrice. Elle m’a offert ce rôle, cette femme, et j’ai amené ma propre compréhension dans cette quête », explique Marion Cotillard, encore légèrement habitée par son personnage.
Avec une véritable pudeur et théâtralisation de certaines scènes, les deux femmes trouvent un équilibre entre le cinéma et la réalité, le vrai et le faux, le corps et l’esprit. Il s’y dégage un recul magnifique sur ce qu’est la lignée - de femmes, l’importance de comprendre ce que le passé, l’époque ou certains hommes ont pu faire sur les femmes, générer leurs combats, continuer à se battre. Un féminisme à son essence pure. Une vraie pépite présentée pour ce 76e Festival de Cannes.
Source: 20 Minutes